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Outil de traduction (Très approximatif) |
Analyste: Fabienne Bouvet Bor Zuljan offre un Dowland à nul autre pareil, se délectant de l'allégresse du désespoir. Un authentique trésor. La mélancolie correspond-elle, comme l'écrivait Victor Hugo, au « bonheur d'être triste »? À n'en pas douter, le premier album en solo de Bor Zuljan le confirme. Le luthiste originaire de Slovénie avait déjà retenu notre attention avec son interprétation profonde et délicate de la musique de Giacomo Gorzanis, apportant un bel équilibre aux côtés d'un Pino de Vittorio flamboyant et gouailleur (Arcana, Classica nº 208). Il se penche aujourd'hui sur la musique de John Dowland, dans un répertoire centré sur ses fantaisies, chefs-d'oeuvre de contrepoint, d'architecture et de virtuosité exaltant ce vague à l'âme caractéristique de la période élisabéthaine. Tout commence ici par un silence. Puis, sous la pulpe de doigts, un douloureux chromatisme fait éclore un monde de larmes, de soupirs et d'amours déçues: c'est celui de Hamlet e Ophélie, celui de Roméo et Juliette. Mais loin de la théâtralité de Paul O'Dette, dont l'intégrale longtemps resta là référence (Harmonia Mundi, 1997 Classica nº 163), Bor Zuljan creuse la veine mélancolique au plus profond, livrant un Dowland à nul autre pareil. Il dilate le temps et laisse l'instrument vivre et mourir dans ses résonances, tout en donnant l'impression à l'auditeur de le surprendre dans un dialogue entre lui et lui-même, tel un moment volé, intime et authentique. Quelle atmosphère! On ne peut s'empêcher d'être emporté par la façon dont, à l'intérieur de ces tempos étirés, l'interprète soutient et conduit les lignes, s'appuie sur les dissonances pour en extraire toute la bile noire, noirceur accentuée par un luth accordé un ton en dessous du diapason actuel. Mais tout à coup, voilà qu'il chante, de sa voix d'ange remplie d'optimisme! Et danse la gaillarde, mollets alertes, ponctuant ces sombres fantaisies de lueurs d'espoir comme autant de petits bijoux colorés viendraient égayer une sombre tenue. Néanmoins, chez Dowland, semper dolens, le chagrin l'emporte toujours. Bor Zuljan ne l'a pas oublié, qui clôt ce programme avec un Farewell magistralement conduit, d'une humanité bouleversante, dont on ressort ivre de mélancolie et heureux. |
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