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Appréciation d'ensemble: |
Outil de traduction (Très approximatif) |
Analyste:
Loic Chahine Entre le Premier Livre, (1686) et le Deuxième (1701), une page de l'histoire de la musique se tourne: Lully meurt. Le Surintendant avait été l'un des maîtres de Marais, qui lui rend hommage dans un célèbre Tombeau deux fois magnifié par Jordi Savall (1975, Astrée/ Aha Vox, et 2003, Alia Vox). Privilégiant les pièces les plus développées et les plus poignantes, le violiste catalan s'est élevé au rang de référence absolue face à laquelle personne n’a vraiment imposé une autre voix.. . C'est ce que parvient à faire François Joubert‑Caillet en jouant la carte de l'intégrale. Plus qu'un exercice encyclopédique, l'exhaustivité révèle bien des « petites pièces » qui nous happent l'oreille: cette Gracieuse (pièce n° 132) habilement phrasée, ce délicieux Rondeau moitié pincé moitié coup d'archet (N° 141). Le Double (N° 33) de telle gigue chante étonnamment, et les Cloches ou Carillon (N° 38) forcent l’admiration par leur à‑propos: Ghielmi en faisait une furie de virtuosité (Naïve, 2002), Joubert-Caillet s'y montre plus raisonnable dans le traitement du son mais aussi plus divers, et s’autorise un rubato qui coule de source et nous emporte. Et tel Prélude (N° 21) expose brillamment toute la variété de l’inspiration de Marais. Il est inévitable qu'au long de cinq galettes bien remplies, la garniture soit parfois moins succulente. Les deux Tombeaux (de Sainte‑Colombe et de Lully) nous déroutent par leur absence de drame affiché... Mais les Suites en mi mineur et si mineur, très réussies chez Savall et chez Marianne Muller (Zig~Zag Territoires, 2005, Diapason d’or), ne sont pas le tournant auquel on attendait cette intégrale. Palette souveraineChoix intelligent, l'instrumentation de la basse continue reste la même tout au long de chaque suite, ce qui confère à chacune une véritable unité et laisse l'auditeur s'y installer. Partout règnent la finesse et le refus de l'ostentation ‑ pour ne rien dire de la technique souveraine du violiste, qui triomphe dans la variété des couleurs comme des sonorités, et dans les doubles cordes soutenues implacablement. Nulle pose, nulle part. Rarement Marais aura été traité avec si peu d’artifice. Ainsi, la seule « excentricité » que s’offrent les Couplets de folies tient dans le recours à un clavecin italien ‑ excentricité au demeurant documentée pour l’Opéra de Paris à la même époque. La lassitude. ne s'installe guère dans ces Folies pourtant rebattues; ici traitées comme une continuité et enlevées en moins d'un quart d'heure, elles semblent le récital d'un poète. Quant à l'étonnante harpe, sa présence inattendue, expliquée dans le livret, se justifie par une recherche de variété, et le continuo d’Angélique Mauillon est un modèle d'élégance. À l'image de l'ensemble.
~~~~~~~ VIOLE DE GAMBE Marais: Deuxième Livre de pièces de viole. L'Achéron. Ricercar.
« Commencé il y a
cinq ans, ce projet fou d'enregistrer l'intégralité des pièces de viole de
Marin Marais (cinq Livres, autour de six cents pièces, une vingtaine de
disques) a désormais trouvé son rythme et sa cadence, m'accompagnant
tranquillement, comme un leitmotiv heureux et sain, une routine agréable et
bienfaitrice. Lentement, régulièrement, ma compréhension de l'ange Marais,
de sa musique et de sa viole de gambe, devient plus claire et plus naturelle, me
laissant mener par les heures (les jours, les semaines, les années!) de jeu et
d'écoute pour remettre en question ce que je crois savoir de lui, de son
instrument, de son époque ‑ et de moi‑même.
Depuis la première session
d'enregistrement à l’automne 2014 jusqu'à la dernière, il y a quelques
mois, pour aborder le Quatrième Livre, tout ce large paysage s'est
doucement transformé. Il est devenu plus net, avec une perspective plus
précise, des aspects inattendus, m'apportant autant
de réponses que de
nouvelles interrogations, et composant par‑dessus tout un tableau d'une rare
beauté.
J'éprouve la sensation
étourdissante d'être en train de gravir peu à peu une montagne sans sommet. » |
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