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Outil de traduction (Très approximatif) |
Analyste:
Philippe Venturini Alexandre Tharaud, tout en délicatesse, offre une vision peu courante d'un Versailles intime. Alexandre Tharaud a beau ouvrir grand les bras sur la photo de couver-ture, le Versailles qu’il invite à visiter n'est pas celui du Grand Siècle, celui de l'apparat et de la pompe. Il a d'ailleurs essentiellement choisi des pièces du milieu du XVIIIe siècle. Un XVIIIe siècle plutôt peint par Chardin que par Boucher ou Fragonard, plutôt illustré par le Rousseau des rêveries du promeneur solitaire que par le théâtre de Marivaux. Un Versailles des alcôves sombrement éclairées à la bougie, propices aux confidences, celui des Ombres errantes (Couperin), plutôt que le Versailles de la galerie des Glaces ou du salon d'Hercule. Aussi entendra‑t‑on davantage d'oeuvres au tempo modéré (sarabandes, chaconne) et à l'expression secrète que de pages éclatantes et conquérantes malgré une Marche des Scythes (Royer) à l'allure décidée et aux ornements affûtés comme des flèches. Dès les premières plages, le ton, mélancolique, voire sombre, est donné. La première partie, non mesurée, du Prélude de la Suite en la mineur de Rameau (1706) a des allures de fin de règne, de quête du silence, ballottée entre ces rondes et ces croches qui se disputent le temps. La seconde fait filer inexorablement sa mesure à 12/8 comme le sable dans un sablier. De même Le Rappel des oiseaux n’a rien d'une bruyante volière mais évoque plutôt d'inquiètes pensées. Le Rameau d'Alexandre Tharaud reste, plus que jamais, après son premier disque chez Harmonia Mundi (2001), le compositeur du lyrisme et du rythme, le maître des sens ‑ le pianiste ose d'ailleurs profiter davantage qu'auparavant des possibilités dynamiques du piano, n’hésitant pas à creuser d'ineffables pianissimos comme dans la Gavotte et doubles ou L’Aimable de Royer, qui déroule sa ligne continue de doubles croches comme un funambule au-dessus d'un abîme de silence. Ce parcours d'un Versailles intime, automnal, s'achève par les Variations sur les Folies d’Espagne de d'Anglebert. L’Espagne, pays de châteaux: une belle conclusion pour un Versailles rêvé.
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