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Diapason # 684 (11 /2019)
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Glossa
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Charles-Hubert Gervais: Hypermnestre Product Image

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Analyste: Jean‑Philippe Grosperrin

Oubliez Watteau. La Régence fut une période faste pour la muse tragique à l'Opéra de Paris. Témoin cette Hypermnestre de Ger­ais (ci‑devant maître de musique de Philippe d'Orléans), créée en 1716 puis remaniée dès 1717 et reprise plusieurs fois jusqu'après la mort de Rameau. Si le sujet (le crime des Danaïdes et de leur père) est alors classique au théâtre, sa matière ne se prête pas aisément à une forme en cinq actes. Raison de plus pour admirer l'habileté du livret dû à La Font, avant et après sa réfection. Car si on entend ici la tragédie de 1717 avec l'épure saisissante de son dénouement, s'y adjoint (heureuse idée) la mouture originale, entièrement différente, du dernier acte, avec dénouement par une Isis ex machina.

Les beautés sensuelles (dès le grand prologue isiaque) d'une musique dont l'invention sait se renouveler, l'économie théâtrale, les sommets d'intensité (dès un premier acte quasi saturé de tragique) font comprendre la vogue de cet opéra. S'en détachent les hautes figures du roi Danaüs et de sa fille déchirée, mais aussi de magnifiques scènes collectives qui excellent autant dans une solennité religieuse inspirée du grand motet (au II) que dans le divertissement nocturne (au IV) où l'épithalame se fond dans une passacaille inépuisable.

 György Vashegyi et ses deux ensembles brillent une fois encore dans leur collaboration avec le Centre de musique baroque de Versailles. Si un rien de flexibilité manque çà et là, on admire le dessin des danses, la précision et le coloris franc des choeurs, un juste sens de la grandeur répandu partout. Grande allure aussi et autorité pour Juliette Mars (matelote ou déesse). Chantal Santon‑Jeffery fait valoir ses qualités habituelles, mais les embarras grinçants de Manuel Nuňez Camelino nuisent à ses interventions.

Philippe‑Nicolas Martin, baryton impeccable, contraste bien avec la noirceur retorse et tourmentée de Thomas Dolié, qui rend justice, jusque dans la maturité du timbre, à l'envergure et à la noblesse de Danaüs. Le goût de Mathias Vidal pour la contention sied au profil de Lyncée, prenant un relief superbe dans les derniers actes.

Katherine Watson, elle, échoue à respirer et déclamer au même niveau. Remarquable dans les courbes voluptueuses de son air avec flûte au II, elle désamorce la tragédie dans un ton trop uniment élégiaque. L'acuité du verbe, l'imagination du mot et l'audace des couleurs manquent cruellement aux moments cruciaux (IV, 2). Demeure un apport majeur et séduisant à la connaissance de l'opéra Régence ‑ en attendant lssé et Sémiramis de Destouches.

 

 

RÉVISONS NOS CLASSIQUES

Charles‑Hubert Gervais (1671‑1744)

Il fut dès 1700 le professeur de composition de Philippe d'Orléans, avec pour fruits deux tragédies lyriques: la Suite d’Armide et surtout, en 1712, Penthée (sur le sujet des Bacchantes d'Euripide).

Logiquement, c'est aussi lui qui devint surintendant de la musique du Régent, au temps des «goûts réunis » qu'illustraient Campra et Couperin. Après l'essai de l'opéra Méduse (1695) et un beau recueil de cantates (Il 712), c'est Hypermnestre (1716) qui consacra durablement Gervais sur la scène tragique : couleurs, gradations, magnificence et concentration ‑ un chef‑d'oeuvre, et sa seule partition enregistrée à ce jour.

L'esprit Régence (sensualité, décloisonnement des genres) anime aussi ses Amours de Protée (1720), opéra‑ballet mythologique mais ami du marivaudage: Vertumne et Pomone (sujet à la mode) règnent sur la dernière entrée. Nommé nolens volens sous‑maître de la Chapelle royale de Louis XV en 1722, il abandonna le théâtre, qui n'est pourtant pas loin dans les plus inventifs de ses grands motets (Super flumina Babylonis, Deus noster refugium).

Autant de découvertes à espérer au disque !

Jean‑Philippe Grosperrin
                       


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