Texte paru dans: / Appeared in: |
|
Appréciation d'ensemble: |
Outil de traduction (Très approximatif) |
Analyste:
Gaëtan Naulleau Sur les genoux bleus de Marie, l'enfant Jésus, d'une joie presque hilare, tient la pointe d'un archet dont un ange pousse l'autre bout. Exaltation à l'abri du désordre, musique et jeu, grandiose et intimité : on ne trouverait pas mieux que ce merveilleux Piero di Cosimo pour préparer l'esprit aux fresques du Vespro. L'éditeur nous guide également avec un livret copieux. L'ami Denis Morrier résume le contexte dans lequel Monteverdi ose une publication hors norme ; Benoît Jourdain interroge son mysticisme; enfin Jean Tubéry détaille en un abécédaire, de Antiphoniarum à Zifare, les notions utiles à tout interprète de cette partition complexe, dans laquelle de nombreuses voies sont possibles. Le chef‑cornettiste les connaît pour les avoir toutes pratiquées pendant trois décennies avec le gratin des formations de musique ancienne, depuis les légions chorales qui font du Vespro l'ancêtre des oratorios romantiques, jusqu'aux effectifs réduits au strict nécessaire. Tubéry emprunte la voie médiane, comme Jordi Savall et tant d'autres : d'une part dix solistes, auxquels revient une partie de la polyphonie, de l'autre les trente-cinq chanteurs de la Maîtrise (mixte) de Reims. Les premiers semblent étrangement loin, les autres, très loin. Et ce n'est pas un mince problème dans une écriture si riche. Même sous les voûtes immenses de San Marco à Venise, les troupes de Gardiner (Archiv) conservaient des contours qui flottent ici. Quand la musique passe des Favoriti à la maîtrise, l'oreille cherche ses repères dans une dilution ‑ plutôt qu'une amplification. Un geste rythmique anguleux et des timbres perçants assureraient une certaine lisibilité au tableau. Mais ce n'est pas le style de Tubéry, qui s'est toujours distingué dans ce répertoire par la flexibilité de ses phrasés, sur une pulsation tout en rebonds. La walking bass du Laetatus sum garde une certaine allure ‑ des cordes pincées la soulignent. Le flou artistique de l’Ave maris stella en double choeur tourne à la bouillie ‑ s'il faut appeler un chat un chat. Le génial théâtre rythmique de la Sonata sopra sancta Maria en pâtit également, malgré l'excellence des instrumentistes. Ils seront mieux servis par les micros dans le grand Magnificat ‑ mais quelle confusion encore dans le Quia fecit mihi magna, où Monteverdi superpose des plans sonores de différentes natures. Des solistes seulement corrects dans les concerti sacri ajoutent à la déception. Tubéry, interprète majeur de Monteverdi, devra revenir à cette oeuvre. |
Cliquez l'un ou l'autre
bouton pour découvrir bien d'autres critiques de CD
Click either button for many other reviews