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Analyste:
Jacques Meegens
Portrait de musicien,
titraient prudemment les anciens catalogues : Portrait de Josquin avancent les
dernières études. Le visage émerge de l'austère arrière-plan d'un noir profond…
Absorbé par ses pensées, il tient une partition. Une musique s'élève : quatre
voix d'hommes entonnent a cappella son motet Planxit autem David. La clarté des
consonances adoucit la verticalité sévère du contrepoint, et porte
à la contemplation. La rondeur du contre-ténor Marnix De Cat, la profondeur des
graves et la puissante harmonie des voix évoquent les grandes heures de la
Capilla Flamenca.
Un autre portrait. L'esquisse, diaphane, représente Isabella d'Este, fille du
duc de Ferrare. Comme pour en souligner la finesse du trait, la délicatesse des
ombres et la douceur des couleurs, un luth, une vièle et une flûte lui
répondent. Une soprano au timbre clair et droit déclame avec mélancolie Le
dépourvu infortuné de Firmin Caron - extrait d'un manuscrit offert à
Isabella pour ses noces avec le marquis de Mantoue.
Musiques sacrées et profanes, vocales et instrumentales émanent ainsi des dix
peintures de Léonard de Vinci reproduites dans le livre-disque. Une visite de
musée immersive ? Un passage de l'autre côté du miroir, dans l'univers des
tableaux ? Une porte ouverte sur l'atelier du maître, qui aimait peindre en
écoutant de la musique ? Les trois à la fois. En 2003, Léonard inspirait un
premier album à Doulce Mémoire : si les chansons et les danses de cette «
Harmonie du monde » évoquaient l'atmosphère de son temps dans une sélection
essentiellement profane, « La Musique secrète » fait une bonne place aux
motets et aux extraits de messes.
L'originalité de la démarche se fonde sur un travail historique et artistique
magistral, en collaboration avec un conservateur du Louvre. Remarquablement
pédagogique et détaillé (trilingue, près de 130 pages), le livret nous guide à
travers les tableaux et les pièces musicales - de nombreuses raretés italiennes
et franco-flamandes toujours intimement liées aux peintures, de la déclamation
reconstituée d'un sonnet de Pétrarque à l'Ave Mater Matris Dei de Jean
L'Héritier. Le geste du musicien reflète celui du peintre, dans le clair-obscur
des voixou le sfumato de la lira da braccio.
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