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Outil de traduction (Très approximatif) |
Analyste: Philippe Venturini CURE DE JOUVENCE Céline Frisch s'empare du Livre Il de ce manifeste musical qu'est Le Clavier bien tempéré. Un tempérament bien trempé! Au clavecin d'Anthony Sidey et Frédéric Bal d'après Silbermann choisi pour le Premier livre du Clavier bien tempéré (Alpha, 2014, CHOC, Classica no 179), Céline Frisch a préféré un instrument d'Andrea Restilli d'après Christian Vater de 1738. Cette priorité donnée à la plénitude et à la longueur du son, relayée par la prise de son d'Aline Blondiau et une acoustique légèrement réverbérée d'une salle de bois et de pierre, révèle son projet : pour ce second volume, dans lequel les préludes n'hésitent pas à se développer et à parfois s'approcher de la forme sonate, il faut du souffle, de la vibration entre les notes pour assurer la transition d'une mesure à l'autre et parvenir à la dernière sans flancher. Céline Frisch, pourtant, et on le sait depuis ses Variations Goldberg (Alpha, 2000), n'a rien d'une athlète du clavecin, n’a pas la virtuosité présomptueuse, ne cherche pas la démonstration digitale à coups d'accélérateur de tempo. il faut non seulement tenir la distance mais aussi savoir se repérer dans ce recueil disparate qui a manifestement préoccupé Bach pendant une vingtaine d'années: s'il cède au sourire de l'ornement et à la volubilité que cultivaient ces années 1740, il concentre aussi le discours dans certaines fugues au parcours presque oppressant (la sévère no 8 en ré dièse mineur). JOIES DU LABYRINTHE Avec l'assurance tranquille, la souplesse féline et la grâce aérienne qui signent ses interprétations, l'artiste offre une des versions les plus déliées, les plus lisibles et les plus naturellement lyriques de cette musique complexe. Et ce, dès le Prélude no 1 dont les agrégats de triples croches dynamisent sans jamais le crisper le cours quasi régulier de rubans de doubles croches. Idem dans la fugue qui lui succède: jamais la contrainte technique ne se perçoit, jamais l'effort ne se laisse deviner.
Un tel jeu
prédispose naturellement au chant, comme celui du Prélude n°4, en do
dièse mineur, ou du Prélude n°14 en fa dièse mineur. Mais il
s'accomplit tout autant dans la diversité des styles, italien façon Scarlatti
(Prélude n°5), français avec ses notes pointées empanachées (Prélude n°13)
ou empreintes d'une grave noblesse (Prélude n°16), dans la variété des
humeurs et des climats, de la tempête de triolets de doubles croches (Fugue
n°4) au balancement insouciant d'un 12/8 (Prélude n°19), Le même
naturel préside à la conduite des fugues pourtant ouvragées et complexes dont
l’autorité se déploie avec l'évidence du geste et non la contrainte de la
volonté (n°16 et n°20, par exemple). Avec un tel guide, l'auditeur
peut s'aventurer dans ce labyrinthe souvent intimidant sans craindre de s'y
égarer. Même pas peur! |
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