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Analyste:
Gaëtan Naulleau
L'heure n'est plus aux
dogmes, la subjectivité « historiquement informée » aime s'extraire descadres tracés par les grands aînés : point commun, ces
dernières années, à la bande polonaisede Martin Swiatkiewicz, à l'équipe française de Jean
Rondeau (Erato, 2016) et au collectifbruxellois de Frederick Haas (Hitasura, 2016) dans les
concertos pour clavier de Bach. Troispropositions avec un seul archet par partie, un
demi-siècle après l'exemple primordial deLeonhardt. Trois déconvenues pour une même leçon : un
propos subjectif s'organisebeaucoup plus facilement en solo qu'à six ou cinq
(sans contrebasse, comme ici). A fortioriquand l'écriture concertante est aussi changeante et
intriquée que celle de Bach.
Si Rondeau, Haas et leurs partenaires prenaient le risque d'une effervescence
parfois désordonnée, Swiatkiewicz fonce les yeux fermés. Un violoncelle posant
des fondations métriques plus fiables aurait-il consolidé son propos ? Un
premier violon débordant d'idées, ou plutôt débordé par des idées souvent
gratuites, est un autre souci. Et la prise de son un troisième. Rapprocher le
clavecin des cordes, pour éviter une prédominance artificielle et « romantique »
du soliste, soit, mais sans tomber dans l'excès inverse. Le moindre trait annexe
de violon s'impose au premier plan et brouille la ligne directrice ; le
mouvement initial du BWV 1052 laisse l'auditeur se frayer un chemin dans
un chaos infernal alla Bosch, auquel un grand clavecin avec jeu de seize
pieds apporte plus de remous que de relief. Aapo Häkkinen (même effectif, Aeolus)
et Andreas Staier (face au Freiburger Barockorchester, HM) ont démontré avec
bien plus de tact l'intérêt d'un tel instrument dans ce concerto spectaculaire.
À
la palette plus claire des deux clavecins choisis pour les autres répond
l'étoffe toujours décousue des archets. Mais personne n'ira les blâmer pour la
Sicilienne gauche du BWV 1053 , à laquelle Swiatkiewicz refuse
tout à la fois la noblesse et la mélancolie. L' Adagio du BWV 1054
nous rappelle enfin que nous retrouvons ici un soliste admiré à plusieurs
reprises – au sein de l'ensemble de Rachel Podger ou face à l'orchestre Arte de
Suonatori dans de splendides concertos de Müthel (Bis).
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