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Appréciation d'ensemble: |
Outil de traduction (Très approximatif) |
Analyste:
Gaëtan
Naulleau Un programme librement partagé entre deux pages connues au foisonnement polyphonique toujours flatteur, et trois compositions à voix seule pour la Semaine Sainte, a priori plus austères. L’adjectif s'efface dès que Jonathan Cohen s'installe à l'orgue devant les fidèles d’Arcangelo. La pompe inhérente aux Offices de ténèbres du Grand Siècle l'indiffère. Les préludes s'étirent en Arcadie quand il s'agirait plutôt d'affirmer, certes avec grâce, l'importance du texte qui doit être lu. Esthétiquement, c'est divin. Expressivement... étrange. Sans socle à la basse, sans contours, les effluves du petit groupe de cordes et de flûtes avec théorbe rehaussent par contraste la fermeté que Stéphane Degout met à chaque parole dans la Leçon de ténèbres H 120 (dont Cohen, soit dit en passant, omet les doublures de hautbois et de basson). Presque deux fois plus long, le parcours de la H 123 en souffre davantage. Sa dramaturgie tourne en rond pour finalement s'épuiser sur les Jerusalem conclusifs: quel rapport entre le caractère que les instruments lisent dans ce motif et la noble autorité que Degout lui insuffle en alternance ? Entre les deux, la H 138 pour ténor et continuo nous montre Charpentier travaillant un registre plus intime, où excelle Samuel Boden. Son chant céleste nous rappelle moins Gérard Lesne (dans l'unique gravure jusqu'ici, Virgin) que la distinction et la subtilité d'un Paul Agnew. Ce sera la plus belle partie d'un album où nous guettions plutôt le retour des Litanies à six voix et deux dessus de violes (ou deux violons, comme ici) trente ans après les deux concerts qui révélaient cette merveille lors des Grandes Journées Charpentier du CMBV. Aussi différents soient-ils, les albums de Jordi Savall et William Christie réalisés dans la foulée traduisaient le mélange singulier d'élans et de dissonances suaves, de suspension mystique et de sophistication contrapuntique dont Charpentier nous régale. Plus tard, Hervé Niquet puis Sébastien Daucé ont mis un point d'honneur à se soustraire au modèle de Christie, auquel se rallie le collectif londonien. Avec Bojan Cicic, Sophie Gent et Jonathan Manson aux archets, la splendeur légère des parties instrumentales prolonge l'album Couperin d’Arcangelo. Mais rapidement, l'interprétation nous ramène au bémol souvent noté chez Jonathan Cohen: sa direction, toujours attentive à glisser d'une idée à la suivante, nivelle une éloquence prisonnière de cette souplesse obligée. Les ponctuations rhétoriques sont tout juste esquissées, et le caractère propre des nouveaux dessins mélodiques effleuré (l'entrée magique sur « Speculuum iustitiae » tombe à plat). Tensions et détentes se fondent, l'ennui s'installe, et plombe encore le vertigineux Magnificat pour trois voix d'hommes.,Son ostinato (89 fois sol-fa-mi bémol-ré au continuo, sans une seule redite au-dessus!) se voit traité comme une simple berceuse, aux rythmes dénervés. L’oeuvre qui nous fascinait chez Christie (HM), Gester (Accord) et Malgoire (CBS, à rééditer) semble alors d'une longueur démesurée. La présence lumineuse de Boden et la perfection de la réalisation n'y peuvent rien. |
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