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Diapason # 666 (04/2018)
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BIS
BIS2251




Code-barres / Barcode : 7318599922515

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Analyste: Gaëtan Naulleau

 

Le musicien poète

Tour de force pour ce qui est de la couleur, de l’espace choral, de la confiance réciproque entre Grete Pedersen et son ensemble d’Oslo, leur version des six motets gagne une dimension poétique inestimable.

L’oreille moderne, éprise de transparence et rassurée par le détail net, cherche ses marques quand surgit le premier appel du Komm, Jesu, komn, venu de loin. Mais elle s’y retrouve vite et se laisse guider par deux alchimistes du son, l’ingénieur Jens Braun (et ses collègues de Take 5) et Grete Pederson. Donnez-lui un bouquet de mélodies populaires (« White Night », 2010) ou des guirlandes pour Noël (« Ros », 2013), et déjà elle investit avec son chœur de solistes norvégiens des espaces sonores insensés, que prolongeait en 2016 le génial « As Dreams », plongé dans les nuits de Lachenmann, Nǿrgard, Saariaho et Xenakis (Diapason d’or, cf nº 655). On l’attendait moins chez Bach.

Retour au début : Komn, Jesu, komn. Le contour est incertain (Pedersen excelle à jouer avec tous les degrés du flou) mais l’image poétique reste intelligible dans son moindre atome. Comme cette virgule (avant « Jesu ») qui gagne un espace, une aération différente à chaque répétition de l’appel en double chœur. L’exhortation s’affirme, s’adoucit, se relâche, anticipant les mots « Mein Leib ist müde » (Mon corps est faible) sur lesquels Bach referme cette introduction : une arche parfaite.

Voilà pour les trente premières secondes d’une intégrale à la fois essentielle et atypique, peaufinée en trois session de février 2015 à février 2017. Continuer à scruter ce qui nous déroute et nous chavire serait la trahir : la vibration de ces figures dans les visions et l’espace importe beaucoup plus que leurs contours indépendants.

Ironie du sort, Jens Braun était aussi à la console en 2009, pour les mêmes œuvres, avec l’équipe de Masaaki Suzuki : apothéose des angles polyphoniques, d’une déclamation droite, de l’analyse mettant l’architecture à vif (Diapason d’or, cf nº 579). Soit l’inverse de Pedersen ! L’instabilité maîtrisée des éclairages, des inflexions du détail madrigalesque (ces vocalises en flammèches inégales pour peindre l’élan de l’Esprit au début du BWV 226 !) rappelle plutôt l’hypersensibilité virtuose de Gardiner avec son Monteverdi Choir (cf nº 604). Mais ce qui s’articule chez lui comme une rhétorique, libère avec elle une projection poétique dont on trouve peu d’exemples dans la discographie des six motets.

Pedersen n’attise pas les rythmes du Singet dem Hern comme Gardiner et pourtant l’expansion polyphonique est aussi renversante. Le souffle qui porte la fresque Jesu meine Freude jusqu’au Gute Nach onirique vous hantera longtemps.
 


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