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Analyste:Loïc
Chahine
La
cantate française est intimement liée au nom de Clérambault, qui signe les deux
« tubes » du genre les plus couramment joués et enregistrés à notre époque,
Orphée et Médée. Pour ce deuxième opus discographique, l'ensemble A
Nocte Temporis et Reinoud Van Mechelen, l'une des hautes‑contre les plus prisées
de sa génération, ont retenu trois cantates peu connues et le tableau tendre et
tragique de Pyrame etThisbé, dont Jean‑Paul Fouchécouri (HM) et Gérard
Lesne (Virgin), ont déjà fait leur miel. Le reste nous promet des émotions plus
modérées. On découvre L'Amour guéri par l'amour (le début de son premier
air évoque « Faut‑il qu'Amarillispérisse » dans Le
Berger fidèle de Rameau) et Le Jaloux, où un banal texte amoureux
donne l'occasion d'airs où s'épanchent tantôt une richesse harmonique
inattendue, tantôt une grâce toute française. Apollon, cantate pour la
paix, dédiée au roi, voit un « berger des bords de la Seine » élevé au Parnasse
pour chanter la gloire de Louis XIV, occasion pour Clérambault de signer
quelques pages tout en nuances et en évocations, dont la saisissante
Symphonie initiale.
Et quel somptueux écrin pour la cantate française! Rarement elle aura bénéficié
de tant de séductions plastiques. La discographie accorde en effet une large
place aux diseurs et diseuses autour de qui s'arrange un accompagnement d'allure
plus ou moins âpre. Ici, les interprètes font l'inverse: tout n'est que
chatoyance. On admire le soutien des valeurs longues, voire leur tension qui
flatte les dissonances, rappelant que la cantate française se veut l'héritière,
à sa manière, de son homologue italienne. On se délecte du digne continuo de
Benjamin Alard, sans esbroufe, et du beau son de viole de Myriam Rignol.
La légère acidité
du violon d'Emmanuel Resche équilibre la molle douceur de la flûte d'Anna
Besson, les deux dessus osant même parfois des unissons bienvenus.
Reinoud Van
Mechelen s'écoute‑t‑il un peu trop chanter ? Mais le timbre, somptueux, se
colore sans préjudice pour la diction du texte, et trouve
dans la nuance un resssort de l'intensité. Tout est élégance, équilibre,
retenue. Et quand arrive, en fin d'album, Pyrame et Thisbé, le drame
reprend ses droits.
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