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Diapason # 664 (01/2018)
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BIS
BIS2265



Code-barres / Barcode : 7318599922652

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Analyste: Emile Huvé
 

Le luth a connu tant de mutations qu'il 'est plus prudent de parler de luths au pluriel. Dans son précédent disque, « Italian lute Virtuosi of the Renaissance », Jakob Lindberg jouait un instrument à six choeurs (paires de cordes), autorisant une technique de main droite plus primitive, qui mobilise principalement l'index et le pouce replié à l'intérieur. Il accoste au XVIIe siècle avec un instrument à onze choeurs, un ambitus élargi et une technique où le pouce peut faire sonner les basses sans déplacement de la main : autant d'évolutions dont a profité une foisonnante école instrumentaIe en France d'abord, puis en Allemagne,

Glanant pour son récital ce qu'aurait pu être le répertoire d'un luthiste des années 1715, Lindberg utilise un magnifique instrument original de Sixtus Rauwolf, fraîchement restauré, fabriqué au début du XVIe siècle avant d'être profondément remanié un siècle plus tard. Il devenait alors un luth baroque à proprement parler. La savoureuse Suite de François Du­fault (avant 1604‑ca. 1672) ‑ dont on sait peu de choses ‑ s'inscrit déjà dans les contours de la Suite de danses que le clavecin et l'orchestre développeront ultérieurement. Le langage harmonique de Charles Mouton (1626‑après 1699) comporte plus de surprises, et son imagination annonce déjà Couperin ‑ les titres donnés à chacun des morceaux! ‑, admirable par la variété des humeurs et des allures, ajoutant une facétieuse Canarie aux plus habituelles Allemande, Gaillarde ou Courante. L'intériorité du chant et la qualité du phrasé font merveille dans la Padoana initiale d'Esaias Reusner (1636‑1679). Jakob Lindberg s'avère moins convaincant lorsqu'il aborde quelques Suites françaises, nettement plus impétueuses et rebondissantes sous les doigts d'Hopkinson Smith.

Le luth tombant peu à peu en désuétude en France au cours du XVIIe siècle, les instrumentistes se déplacèrent souvent Outre‑Rhin et une riche école se développa en Allemagne, dont la musique de Silvius Leopold Weiss (1687‑1750) représente la synthèse la plus achevée. Jakob Lindberg, qui avait lui consacré un disque entier en 2006, est un interprète de choix pour la grande Suite en la majeur, grâce à un jeu profond et contemplatif, des pulsations claires, des tempos inflexibles. Il traduit aussi avec un bel engagement la Campanella qui ouvre la Suite de David Kellner (ca, 1670­1748), ou l'intériorité de la Sarabande
« L’Amant soupirant » du mystérieux Mr Pachelbel (ca. 1653‑1706). Ce disque au minutage généreux présente un panorama très équilibré et réussi de la grande floraison du répertoire du luth. L'auditeur pourra en apprendre davantage sur cette riche période en se tournant vers des interprétations plus diversifiées. Jakob Lindberg n'en demeure pas moins un guide très fiable, par sa fidélité au texte et l'authenticité de son inspiration.     
       


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