Quelques mois à peine après la parution d’un remarquable enregistrement du sixième livre de madrigaux de Gesualdo, la Compagnia del Madrigale opère comme un retour aux sources, à travers cet enregistrement des madrigaux du premier livre publié de Luca Marenzio. Souvent considéré comme l’une des figures majeures du madrigal polyphonique tardif, aux côtés de Gesualdo et Monteverdi notamment, Marenzio apparaît néanmoins beaucoup moins connu que ses deux illustres contemporains. C’est le cas tout particulièrement pour les madrigaux de ses premiers recueils, rarement enregistrés, en partie éclipsés par les madrigaux plus riches en chromatismes des livres plus tardifs. Mais si les madrigaux rassemblés sur ce disque semblent davantage ancrés dans le XVIe siècle qu’ils n’annoncent le XVIIe, et les licences puissamment expressives de la seconda pratica, on y découvre néanmoins une main déjà sûre, qui sait employer avec justesse toutes les ressources de l’écriture polyphonique, pour exprimer le sens des paroles. Tout autant que dans le précédent disque, l’expérience des interprètes impressionne.

La souplesse des tempos; la variété des dynamiques et le souci de justesse expressive dans la diction du texte sont toujours admirables, et l’on est frappé par le naturel émanant de l’en- semble. Certes, ce disque n’a pas l’intensité du précédent, dédié à Gesualdo : les madrigaux du jeune Marenzio sont plus légers, moins saturés de dissonances, moins torturés que ceux du Prince de Venosa. Parfois, presque naïfs même par la récurrence des sujets pastoraux, en dépit d’occasionnels sous-entendus érotiques ( « Tirsi morir volea »). Mais ils ne sont pas moins animés ici d’une intense vie intérieure.