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Classica # 196 (10/2017)
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Analyste:  Philippe Venturini

LARMES FATALES

Le quintette de violes Sit Fast offre une interprétation hypnotique, sensuelle et éloquente de Lachrimae, or Seven Tears de Dowland. 

Plutôt qu'une intégrale du recueil des vingt et une pièces de Dowland publié à Londres en 1604, Sit Fast a préféré n'enregistrer que les sept pavanes d'ouverture et y associer Upon Silence composé par George Benjamin. pour mezzo-soprano sur un poème de William Butler Yeats. Éloignés de quatre siècles, ces deux compositeurs britanniques adoptent tous deux cinq violes (Dowland admet des violons) pour confier leur mélancolie, celle des écrivains élisabéthains Nicholas Breton (Mêlancholike Humours), Robert Burton (Anatomy of Melancholy) et Shakespeare (Hamlet).

Le quintette de violes Sit Fast et le luthiste Karl Nyhlin se sont manifestement imprégnés de ces lectures et ne cherchent pas à transposer cet état trouble dans notre monde moderne du zapping. Aussi choisissent­ils des tempos retenus, Propices à la noblesse du propos et à la dignité de l'élocution. Ces « Sept Larmes » s'écoulent alors avec un débit d'apparence régulière qui, paradoxalement, révèle leur riche diversité. Une parfaite intonation assure une homogénéité exemplaire de la texture instrumentale, comme si un archet unique tissait ce voile sonore dans lequel s’étouffent les sanglots. Malgré cette onctuosité de la matière, superbement restituée par la prise de son, la clarté polyphonique demeure: la voix supérieure porte la mélodie, celle de l’air « Flow my Tears » de Dowland sur lequel repose cette série de variations. 

Pourtant enregistrées par les meilleurs ensembles, tels Jordi Savall et Hespèrion XX (Alia Vox, 1987), Fretwork (1987-1989, Virgin) ou The Parley of Instruments (Hyperion, 1992), ces Lachrimae, or Seven Tars doivent désormais compter sur la version de Sit Fast, hypnotique, sensuelle et éloquente, comme l'une de ses plus convaincantes.

Rejoint par la mezzo‑soprano Sarah Breton, le quintette se montre tout aussi à l’aise dans la musique de Benjamin, plus dynamique, plus instable, mais tout aussi saisissante.

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