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Analyste: Gaëtan Naulleau On s’étonnait l’an dernier que Cecilia Bartoli n’ait pas ménagé une seule pause instrumentale dans son récital « Mission » à la gloire d’Agostino Steffani (Diapason d’or, cf. n° 606). La matière ne manquait pourtant pas ; si le compositeur nous laisse une production uniquement vocale, ses opéras écrits pour Munich et Hanovre regorgent d’Ouvertures et de danses de la meilleure eau, témoins de sa parfaite assimilation du style français, appris à Paris à la fin des années 1670. Bartoli, malgré tout, préférait enchaîner sans relâche une vingtaine d’airs, à la façon d’une cantate géante qui traversait méthodiquement tous les états de la carte du tendre. Mais ce n’était pas fini. Diego Fasolis, le chef qui aidait la diva à donner un rythme, un souffle, au kaléidoscope du récital, gravait dans la foulée un riche florilège instrumental (outre le Stabat Mater). Son art des caractères et des tableaux sonores n’est pas un mince atout pour renouveler l’intérêt dans cette ribambelle de quarante pièces - qui, d’ailleurs, aurait eu l’idée d’en écouter seulement douze à la suite du vivant de Steffani !? Pour exalter leur variété, tous les moyens sont bons (retouches d’instrumentation, greffe de percussions). Dès la plage 3, il juxtapose à un charmant menuet vingt secondes de cavalcades guerrières. Surtout, sous sa battue, aucune des huit Ouvertures au programme ne se ressemble (mais pourquoi faut-il, chaque fois sans exception, qu’il reprenne la partie A forte après un pont crescendo ? ). Celle des Trionfi del fato - superbe partition - se voit bardée d’une percussion pompeuse : impressionnant, mais assez ringard en 2013. Reste que la Sinfonia nerveuse et sombre de Marco Aurelio, l’Ouverture d’Orlando, la plénitude solaire de l’Introduzione d’Amor vien dal destino, le tableau des Ombres et une marche rugissante portent la marque d’un vrai chef de théâtre. Il n’a pas
la main aussi heureuse côté danses. De l’élan, de la souplesse, pour peu
d’articulation précise. Les Sonatori de la Gioiosa Marca, dans un album
Steffani paru il y a quinze ans (« Suites théâtrales », Divox),
ajustaient très efficacement les fins ressorts des danses françaises : les
archets de Lugano laissent les gavottes se relâcher, ou forcent leurs
appuis. La Chaconne d’Henrico Leone se prélasse dans un flou
artistique (la pièce vaut le détour : véritable patchwork des chaconnes
lullistes). Le problème vient peut-être de hautbois qui ont tout l’air de
déchiffrer – comme dans la sarabande impressionniste de la plage 41, où
s’invite la Fée Clochette. |
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