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Diapason # 637 (07-08/2015)
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L'Oiseau Lyre
Decca4787863 
Erato
 2564611226

Code-barres / Barcode : 0028947878636

Code-barres / Barcode : 0825646112265
Appréciation d'ensemble:

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Analyste: Gaëtan Naulleau

La voix rêvée des anges

 

Decca (L’Oiseau‑Lyre) et Erato (Virgin) reviennent en deux coffrets sur les années 1970 et 1980 d’ Emma Kirby, soprano cristallin et emblème du renouveau baroque.

 

Souvenir de La Joconde ? Sur le coffret L'Oiseau‑Lyre, l'icône rousse au teint de lait et au demi‑sourire nimbé de lumière chaude nous rappelle plutôt que le public découvrait conjointement « The Lady Musick », premier récital d'Emma Kirkby en 1978, et les Tendres Cousines de David Hamilton. Le flou faisait fureur sous les objectifs et les filtres gris tartinés de vaseline, mais la voix juvénile était, bien au contraire, unique par sa franchise. Son compagnon et mentor Anthony Rooley insistait (cf Interview … pour que la partie de luth reste distincte sous le chant: la transparence que la jeune femme cultivait en retour était à la fois une discipline du timbre, à peine vibré, et une clarté de l'intention.

 

LA POÉSIE MÊME

 

Retrouver cette « Lady Musick » en tête des douze CD, c'est immédiatement retomber sous le charme des mots cristallins et d'une sincérité qui n'appartient qu'aux amis. Le florilège élisabéthain reste un enchantement même si l'oreille garde en mémoire la voix plus substantielle qui s'épanouissait quelques années plus tard, au zénith dans le récital Purcell de 1982. L'Evening Hymn est la poésie même, If Music be the food of love une caresse ‑ et une flèche imparable quand tombe le dernier vers.

 

Qui se souvenait des trois albums en duo de 1979? Commencez par les «Pastoral Dialogues » avec David Thomas, basse à fleur de lèvres dans un extraordinaire Sorrow stay où la mélancolie devient, en miroir, un jeu de séduction. Plus inégaux, les albums avec Martyn Hill et Judith Nelson livrent aussi des perles. Une voix aussi claire, si elle s'indure dans l'aigu ou perd un instant le diapason, griffe l'oreille : écoutez comment elle domine le moindre détail de Maddalena alla Croce (Frescobaldi), à nu dans une acoustique sèche avec pour seul soutien le luth de Rooley. Notre XXIe siècle a pris l'habitude d'ajouter beaucoup de sauce dans ce répertoire, pour flatter l’auditeur mais aussi pour accomoder des voix moins exceptionnelles...

 

Les sept galettes suivantes présentent Emma Kirky avec Christopher Hogwood, toujours en confiance: Bach en 1986 et 1997, un portrait vocal de Cecilia Young (Handel‑Arne‑Lampe, disque assez froid en vérité), un réjouissant bouquet de cantates italiennes, des extraits célèbres du Messie, l’Ange de La Résurrection et celui de La Création. Ceux qui raillaient encore en 1989 la fragilité d'une voix légère formée hors de toute école ont dû rendre les armes à la parution du deuxième récital Mozart, avec son Ah, lo previdi supérieurement porté et senti, et un « Ruhe sanft » tombé du ciel.

 

Le coffret L'Oiseau‑Lyre n’a qu’un défaut, tirer le portrait de la soprano en oubliant la moitié de son activité, en consort. Le coffret Erato (Virgin: 1986‑1989) est plus mince mais, à cet égard, plus complet. Et précieux, car il nous rend enfin l'un des joyaux du Consort of Musicke, son disque le plus riche de caractères et de couleurs, très inspiré par les tableaux madrigalesques de Giaches de Wert (champion du genre à Mantoue avant Monteverdi). Merveille encore, le récital Dowland de 1988 en tête-à‑tête avec Rooley, où la lumière de la voix et la tendresse de la musicienne s'enrichissent d'une chaleur irrésistible.

 

 

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