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Diapason # 614 (06/2013)
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Onyx Classics
ONY4114




Code-barres / Barcode: 0880040411420

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Appréciation d'ensemble:
Analyste:  Gaëtan Naulleau
 

C’est peu dire qu’on était curieux de retrouver Viktoria Mullova dans trois concertos enregistrés il y a une quinzaine d’années déjà, avec un groupe de solistes épatants en guise d’orchestre, et des rythmes, des couleurs, des lumières, qui en faisaient l’une de nos versions favorites sur instruments modernes (Philips, 1996). La route fut longue ensuite, motivée par sa passion nouvelle pour les approches « baroques», et fêtée lors d’une intégrale des sonates pour violon et clavecin de Bach (Onyx, 2007, Diapason d’or). Ottavio Dantone, son partenaire pour ce cahier, la guide à nouveau dans les concertos. Une chance, si l’on pense au concert parisien où Mullova donnait le BWV1042 avec un Giardino Armonico autocaricatural dans sa volonté systématique de contrastes et de rebond immédiats. On est vite rassuré avec l’Accademia de Dantone, qui sait creuser les détails sans se crisper. Mais n’en voit-elle pas trop sur la page? La question se pose dès la ritournelle d’ouverture du BWV 1042, aux nuances foisonnantes, et certes cohérentes, unifiées par un bel élan, mais d’une intelligence un rien m’as-tu-vu. Le premier mouvement du BWV1041 ne sera pas moins contourné. A quoi bon tordre, par exemple, une progression régulière, où l’orchestre répond piano à la soliste la première fois, et la deuxième, mais rugit forte la troisième, sans justification dans la musique de Bach (vers 2’ 15”)?

Mullova s’accorde avec beaucoup d’aisance à cette vision intellectuelle et vive à la fois. Elle y apporte sa noblesse et des couleurs hypnotiques. Certains violonistes, en passant aux cordes en boyau, conservent malgré eux les reflets du métal, dont plus rien ne subsiste dans sa palette chaude et boisée. Mais pourquoi l’orchestre sonne t-il si loin derrière? Difficile, à cette distance, d’estimer l’effectif, dont la notice ne dit rien. Trois premiers violons? Sans doute deux violoncelles (plus contrebasse), qui semblent à quinze mètres de Mullova dans l’Adagio magistralement galbé, mais guère touchant, du BWV 1041. L’Andante du BWV 1042, en revanche, nous laisse béat d’admiration pour la soliste, comme la gigue qui suit, avec des phrasés splendides et un orchestre chauffé à blanc (mais déséquilibré, les violons I dévorant tout crus les Il dans les échanges).

Au lieu du Double Concerto en ré mineur attendu (où en est donc le vieux projet avec Carmignola ?), l’album contient deux transcriptions. Le BWV1053 est joué dans arrangement discutable de la Bach Gesellschaft (qu’elle est bizarre, cette entrée à découvert), par une Mullova bien moins assurée. L’immense premier mouvement avance à tâtons, sans l’élégance capricieuse que Dantone mettait à l’original pour clavecin (L’Oiseau-Lyre, 2008).

Et Dantone, qui voulait un concerto pour dialoguer avec Mullova, a retaillé un arrangement hybride du BWV 1060 en do mineur (connu par la version de Bach pour deux clavecins, probablement dérivée d’une oeuvre pour hautbois et violon). Cette fois, la partie la plus simple, celle « du hautbois», est confiée au violon, tandis que Dantone tricote les guirlandes au clavier. C’est à demi convaincant, pour des questions d’équilibre dans le premier mouvement, et parce que le violon n’est guère flatté par une écriture si dépouillée. L’Adagio, d’un classicisme assumé, nous laisse froid - peut-être parce que nous gardons dans l’oreille la proposition hyperexpressive et non moins subtile de la bande à Podger (Diapason d’or le mois dernier).

 

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