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Analyste:
Gaëtan Naulleau Nos vieilles habitudes ont peu à peu rendu les armes devant les interprétations des concertos de Bach avec un seul instrument par partie, séduites par le gain de détail, de rythmes, par l’échange resserré du soliste et du petit orchestre, qui permet aux meilleurs (Café Zimmermann, Podger, Beyer) d’aller très loin dans le travail des textures. C’est aussi, tout simplement, l’effectif le plus plausible dans une perspective historique. Pourtant, les orchestres de chambre n’ont pas dit leur dernier mot, et celui de Freiburg (4/4/3/2/1) nous rappelle qu’avec une parfaite discipline et des idées claires, rien n’est impossible. Le Double Concerto en ré mineur bondit et rugit. La belle résonance du tutti apporte une plénitude sans opacité; les basses idéalement motrices (toujours l’excellent Guido Larisch au premier violoncelle) soutiennent l’articulation ferme et subtile des violons. Avec ses humeurs ténébreuses et sa pâte somptueuse, le Vivace est un grand moment. Le Largo a tout l’air d’un adagio (vieilles habitudes, ici encore), mais son cantabile ne se laisse jamais asphyxier par la lenteur. Dans le genre, c’est superbe. On voit aussi l’intérêt d’un orchestre fourni dans l’Adagio du BWV 1042 en mi mi neur. Gottfried von der Goltz suspend ses phrases au-dessus d’une nappe de cordes onctueuse - de nouveau, quelle perfection dans la conduite des basses! Pour ces deux concertos, la question du Diapason d’or se posait sérieusement. Mais elle est réglée par la deuxième moitié de l’album. Par sympathie, les deux violonistes qui président aux destinées de l’orchestre depuis vingt-cinq ans se sont partagé les concertos : à l’archet vif et fougueux de Gottfried von der Goltz succèdent les attaques moins franches de Petra Müllejans, qui laisse parfois le tempo se fragiliser dans le premier mouvement du BWV 1041 et manque d’ampleur dans les pirouettes du finale, face à un orchestre sanguin. Certes, l’effectif, ici, ne lui facilite pas la tâche. Il est encore plus discutable dans le Triple Concerto adapté du BWV 1064 pour trois clavecins, si difficile à faire sonner aux violons, et trop empâté avec le Freiburger. L’énergie des solistes n’y fait rien: l’oreille cherche ses marques, comme d’ailleurs dans quasiment toutes les versions. Quasiment, car Rachel Podger vient d’y réussir un tour de force.
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