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Analyste:
Gaëtan Naulleau La bande à Podger Dans
quatre concertos où le violon partage la vedette avec le hautbois, la flûte,
le clavecin, ou d’autres violons, la bande à Podger nous épate par
l’intensité de ses échanges et ses couleurs. Une prise de son superlative ne
gâte rien ! Tant de noms pour souligner que l’heure n’est plus à l’à-peu-près... et pour rêver du jour où le niveau d’excellence qui nous transporte dans l’album de Rachel Podger pourrait devenir notre pain quotidien. Ce n’est pas seulement la maîtrise, la variété des moyens, la qualité des couleurs, la cohésion des timbres qui nous épatent tout au long des quatre concertos, c’est l’intensité proprement musicale qui s’exprime à travers un travail collectif magistral, et nous tient en haleine de la première à la dernière note de chaque mouvement. Podger — qui fondait son petit ensemble en 2007— fait bien de rappeler que ce que nous avons l’habitude d’appeler Double Concerto (BWV 1042) est « en réalité un concerto à six — Concerto a sei, sur la page de titre. Toutes les voix sont déterminantes pour la couleur et la richesse de l’ensemble. L’interpréter avec un seul instrument par partie renforce le rôle de chacun. Tous les musiciens ont alors un rôle concertant. » En témoigne un finale renversant, où l’articulation très prononcée, parfaitement réglée sous les sept archets, et l’attention très fine aux variations de textures génèrent un élan singulier — urgence virtuose et discours lucide dans le même geste. Le Largo ma non tanto ne s’étale pas adagio, pour une fois, mais ne renonce pas à sa nostalgie entêtante. Le Triple Concerto est le seul bémol du programme. Le premier mouvement périlleux, où le clavecin se taille la part du lion, pâtit d’un instrument peu raffiné (mais quel caractère, ce Martin Swiatkiewicz !), puis un traverso terre à terre affaiblit l’Adagio. Mais on retrouve dans le finale fugué l’intelligence du jeu d’ensemble qui nous plaisait tant, et qui ennoblit le Concerto pour violon et hautbois. Le plus précieux — le plus rare — vient à la fin, avec la reconstruction d’une oeuvre pour trois violons d’après le BWV 1064 pour trois clavecins. Ceux qui s’y étaient essayés nous laissaient douter de la légitimité de l’arrangement (les roulades de triples-croches et les bariolages faisaient des grumeaux, la forme se dessinait vaguement). Prenez la bande à Podger, donnez-lui le temps d’affûter la partition, doser les effets, mettre les dialogues en perspective, et voilà le plus italien et volubile des concertos de Bach.
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