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Diapason # 655 (03/2017)
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Harmonia Mundi
HAF8905278



Code-barres / Barcode : 3149020527801

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Analyste: Denis Morrier

Ce troisième volume conclut, l'anthologie des « plus beaux madrigaux » de Monteverdi entreprise par les Arts Florissants, après leur mémorable intégrale des huit Livres en concert à la Philharmonie de Paris.

Comment choisir parmi tous les chefs­d'oeuvre que recèlent les deux derniers recueils publiés par l'Oracle de la musique ? Paul Agnew dit avoir voulu trouver un « équilibre entre les oeuvres phares et les pièces moins connues ». Or, chaque madrigal est un joyau singulier, aucun n'est réellement « peu connu » ! Ail lume delle stelle est sans doute moins souvent enregistré : un magnifique quatuor où les voix s'élèvent pour figurer le regard de l'amant, trouvant dans les étoiles l'image de son adorée. Ce bijou d'esthétique polyphonique «classique » est magnifié par l'harmonieuse équipe de Paul Agnew.

Il est confronté à des compositions plus visionnaires, comme la Lettera amorosa, confiée au chaud contralto de Lucile Richardot. Le somptueux Con che soavità est porté avec ferveur par le chant éminemment sensuel de Miriam Allan, soutenu par l'accompagnement chatoyant des violons et des violes, et surtout par un continuo profus et inventif ‑ prescrit par Monteverdi dans sa partition. On est ébloui par le charme céleste de Dolcissimo usignolo, où Paul Agnew mêle les deux modes d'exécution proposés par Monteverdi: la polyphonie à cinq voix est d'abord confiée à une soprano et aux cordes, puis progressivement enrichie par l'entrée des autres chanteurs, créant un effet aussi inédit que convaincant.

D'aucuns regretteront l'absence de deux monuments « incontournables », Hor ch'el Ciel e la Terta et Altri canti di Marte (auquel a été préféré le plus « décoratif » Altri canti d'Amor), que William Christie magnifiait jadis dans l'un des enregistrements fondateurs des Arts Flo (« Altri Canti », HM, 1980, Diapason d'or), avec le Lamento della Ninfa bouleversant de Guillemette Laurens. Celui de Paul Agnew est bien sage en comparaison. L’invitation de Monteverdi à chanter au « tempo de l'affetto de l'âme » n'a guère été retenue : l'expression paraît plus élégiaque que tragique, le chant de la soprano est expressif, souple mais régulier.

De même, Christie rendait au ballet Tirsi e Clori tous les ressorts de la danse. Paul Agnew y privilégie un dialogue suave et raffiné des solistes: sa gagliarda manque d'élan et de rebond, l'ensemble est empesé. De plus, la présence inadéquate de flûtes à bec (jamais évoquées par Monteverdi, ni dans sa partition ni dans sa célèbre lettre décrivant le dispositif vocal et instrumental) gâte l'équilibre et l'intonation générale.

Paul Agnew conclut cette sélection « partiale » avec « son » Combattimento, où il assume la partie cap­tale du Testo. Certes, dans une discographie pléthorique, on a pu entendre narrateur plus habité (Abbondanza), plus loquace et emporté dans le concitato (Zanasi), plus déchiré dans la découverte de l'aimée expirante (Hollweg). De même, on a pu admirer des tableaux instrumentaux autrement plus colorés et éloquents (Harnoncourt, Garrido, Alessandrini, Jacobs, Sempe ...). Le narrateur de Paul Agnew se place à égale distance de l'incarnation expressionniste et du récit distancié. Comme dans le Lamento della Ninfa, son théâtre des passions est surtout intérieur : l'orateur laisse les mots du Tasse et les sons distiller leur émotion intrinsèque, sans souligner les images ni les idées. Il fait confiance à l'alchimie montéverdienne, et révèle à sa propre façon la puissance de ce chef‑d'oeuvre prophétique.


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