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Diapason # 654 (02/2017)
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DHM  88875143482 



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Analyste: Denis Morrier

Champion des polyphonies Renaissance à la fois coloriste et rythmicien hors pair – Paul van Nevel a souvent dit son peu d'intérêt pour la simplification des moyens expressifs qui prend forme, à l'orée de l'âge baroque, avec la monodie accompagnée. Il ne dédaigne pas, pour autant, Monteverdi, qui fut la tête de proue de cette révolution mais livrait aussi un sommet de complexité polyphonique avec sa Missa in illo tempore. Publiée conjointement avec le célèbre Vespro della Beata Vergine en 1610, c'est l'oeuvre la plus savante et impressionnante de la prima prattica montéverdienne.

Cette Missa a fait l'objet de deux gravures de référence, aux orientations opposées. À celle, hédoniste et harmonieuse, de Philippe Herreweghe, avec les voix mixtes a cappella de l'Ensemble vocal européen de la Chapelle royale (HM, 1990), succédait celle d'Odhecaton, résolument engagée dans l'historicité, avec ses voix exclusivement masculines et vivement projetées dans l’acoustique généreuse de la basilique Santa Barbara de Mantoue : une lecture qui ne cherche pas la perfection homogène des lignes mais leur élan rhétorique, et un relief sonore rehaussé par un orgue historique de 1565 et quelques autres instru-ments de continuo (Ricercar, 2011, Diapason d'or). Par comparaison avec la proposition d'Odhecaton, le Huelgas Ensemble a cappella avec des voix mixtes au couleurs septentrionales, apparaît rétrograde. Van Nevel, qui fut jadis l'apôtre des interprétations « historiquement informées » mêlant avec bonheur voix et instruments, a ici paradoxa-lement écarté la partie de Bassus generalis pour orgue de l'édition de 1610, et rejeté l'option des doublures instrumentales, pourtant attestées lors d'une exécution vénitienne dirigée par Monteverdi.

Face à l'Ensemble vocal européen dans ses très grandes années, la lecture chorale des nouveaux venus reste bien pâle. Les entrées des motifs sont insuffisamment dessinées, et la polyphonie manque globalement de netteté ‑ les voix féminines graves, souvent indistinctes, y sont pour beaucoup. La dynamique et l'expression de la parole baignent dans une douce lumière néo‑palestrinienne, quelque peu compassée.

Van Nevel a choisi d'insérer entre chaque mouvement de ce chef-d'oeuvre de stile antico une composition profane en stile modemo. Il présente ainsi différents auteurs préfigurant la seconda prattica, parmi lesquels De Wert et Marenzio, Le madrigal Laura ch'el verde lauro de Nicola Vicentino, qui compte parmi les expériences chromatiques les plus fameuses de la Renaissance, crée un contraste singulier après le Kyrie diatonique de Monteverdi. Tandis que le dialogue concertant de l'étrange Amor, i’ho molti de Cesare Todino tranche avec la densité polyphonique du Gloria.

Si ces ruptures stylistiques nous gênent, c'est parce qu'elles brisent la continuité du discours montéverdien : la messe « di studio e fatica grande » (selon les termes d'une lettre de Cassola, vice‑maitre de chapelle mantouan, en 1610) est en effet une suite de variations contrapuntiques, sans cesse renouvelées, autour de dix motifs empruntés à Nicolas Gombert, traités « dans tous les sens », à la manière d'une « série » de Schönberg. Le mélange des styles imposé par Van Nevel détourne l'attention de la profonde unité formelle et stylistique qui fait la particularité clé la prima prattica, sans rien apporter de probant et de consistant en compensation. Qui veut trop embrasser mal étreint ?

 

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