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Musiques de l’Église, musiques de la Cour et la mémoire historique des chants du peuple.
IN EXCELSIS DEO 1702-1714
Avec ce programme « IN EXCELSIS
DEO » au temps de la Guerre de succession d’Espagne, nous voulons présenter
en miroir la Missa « Scala Aretina » à quatre chœurs du compositeur catalan
Francesc Valls (1671-1747), et la Messe à deux chœurs et deux orchestres du
compositeur français Henry Desmarest (1661-1741), deux chefs-d’œuvre
exceptionnels connectés dans le temps, et liés par l’histoire de ce XVIIIe
siècle naissant, mais encore trop méconnus dans notre XXIe siècle. En effet
ces œuvres rares, créées par deux des plus grands compositeurs de Catalogne
et de France, – faisant partie d’une même génération (Valls est dix années
plus jeune que Desmarest) –, sont liées par l’histoire conflictuelle des
couronnes française et espagnole durant la Guerre de Succession, qui
commença en 1701; la Missa Scala Aretina composée à Barcelone à la fin de
1701 fut interprétée au début de 1702, tandis que la Messe de Desmarest fut
composée vers 1704, juste après son séjour à Barcelone. La Missa Scala
Aretina fut interprétée pour la première fois en la cathédrale de Barcelone,
tandis que la Messe à double chœur fût présentée probablement à la Chapelle
Royale de Versailles (certainement après 1704, si l’on tient compte des
mentions par Philidor des chanteurs de la chapelle royale et des
instrumentistes de la cour, dans sa liste des participants à l’occasion de
l’interprétation de cette œuvre). Nous sommes donc en pleine période de la
terrible guerre entre l’Espagne et la Catalogne, dans laquelle s’opposèrent
les troupes espagnoles et françaises partisanes de Philippe V et les troupes
catalanes et autrichiennes de l’archiduc Charles d’Autriche, également
soutenues par le peuple de Catalogne désirant garder sa liberté. L’idée de réunir dans un même programme ces deux merveilleuses messes, a pris forme dans le cadre de la collaboration régulière que nous avons, depuis de nombreuses années avec le Château de Versailles et son directeur artistique et directeur du « Festival Château de Versailles Spectacles », Laurent Brunner. C’est lui-même qui m’a fait la proposition de ce programme : passionné comme lui tant de musique française que de musique catalane et espagnole, j’ai tout de suite accepté le pari avec un grand enthousiasme. Nous avons immédiatement commencé à étudier de quelle manière ce projet serait faisable: pour commencer j’ai pu compter sur la collaboration de la Fondation Centre Internacional de Música Antiga, avec laquelle nous avons préparé tout le travail de recherche, avec notre chef de chœur Lluís Vilamajó nous avons procédé à la sélection des participants vocaux (qu’ont constitué les voix de La Capella Reial de Catalunya) et avec Manfredo Kraemer, notre concertino de l’orchestre Le Concert des Nations nous avons défini les instrumentistes nécessaires pour les différents effectifs de chacune de ces deux œuvres. La suite a été possible grâce à l’efficace collaboration de l’équipe culturelle de la Saline Royale d’Arc et Senans et au soutien de son directeur Hubert Tassy. C’est dans ce lieu extraordinaire que nous avons réalisé la préparation musicale du projet (du 26 au 29 Juin 2016), avant de le donner en concert, pour la première fois, à la Cathédrale de Dole le 30 Juin puis les 2 et 3 Juillet de la même année, lors des concerts donnés en la merveilleuse Chapelle Royale de Versailles, durant lesquels notre ingénieur et « maître du son » Manuel Mohino réalisa l’enregistrement live qui accompagne cette présente édition.
FRANCESC
VALLS
Francesc Valls (1671-1747), est
certainement l’un des compositeurs catalans les plus emblématiques du
baroque ibérique, dont la biographie ne nous est pas complètement connue
dans son ensemble, en particulier en ce qui concerne sa naissance et sa
formation. On a mentionné sa présence parfois sans véritable preuve à
Valence à Mataró ou à Gérone, mais on sait qu’il a bien succédé à Juan
Barter à la cathédrale de Barcelone où ont été jouées la plupart de ses
œuvres. Compositeur fondamental de la musique catalane et plus généralement
de la musique espagnole de l’époque, il montre dans ses œuvres une
connaissance des nouveaux courants musicaux venus de France, d’Italie et
d’Allemagne. La Missa Scala Aretina, qui suscita une grande polémique
musicale en son temps (voir l’article ci-joint de Josep Maria Gregori),
devait durant des décennies demeurer la composition sacrée espagnole la plus
remarquée. Partisan de l’archiduc dans la guerre de succession, il fut
marginalisé par le nouveau pouvoir après la chute de Barcelone du 11
septembre 1714. La présence de musiciens de la chapelle autrichienne de l’archiduc, durant le séjour de celui-ci à Barcelone, pourrait expliquer certains parallélismes entre l’écriture et la formation vocale et instrumentale de Valls et de Biber ; la Missa Bruxellensis de celui-ci comporte 23 voix, desquelles 8 voix sont distribuées en deux chœurs de 4 voix chantées, et le restant des 15 parties, jouées par les trompettes, violons et violes, hautbois, cornets et saqueboutes, orgues et timpani, tandis que la Missa Scala Aretina de Valls, est écrite pour 11 voix, distribuées en trois chœurs (3, 4 & 4), plus 2 violons (doublés par les hautbois) et 1 violoncelle, 2 orgues, 1 harpe et 2 trompettes (plus 1 violone et 1 timpani, rajoutés suivant la pratique du temps). Mais malgré ces similitudes avec les grandes messes de Biber, le génie de Francesc Valls se manifeste par une personnalité bien caractérisée ; une écriture joyeuse et pleine de spontanéité, toujours extrêmement riche d’effets et de contrastes, de contrepoints développés en passages concertants entre les parties solistes ou avec les trois chœurs, alternés avec des parties en sextuor (Qui tollis peccata mundi) ou en quatuor (Et incarnatus est) pleines de grande douceur et tendresse. Les combinaisons de polychoralité et de jeux d’harmonies s’enchainent souvent de manière surprenante, et nous font sentir leur modernité et leur caractère innovateur. Valls qui fut critiqué pour faire commencer dans son Miserere nobis une quatrième voix par une 9e sans préparation, se défend en argumentant : « ¿Qué son las reglas en las artes, sino instrumentos y medios para lograr el fin de ellas ?… Ahora pregunto : ¿Cuál es el fin de la música? cualquiera que no sea sordo responderá que la melodia; pues como se logre ésta, ¿qué importa si falté en alguna de las reglas que establecieron los antiguos…? Si se permite el uso de las especies disonantes porque ellas son las que dan mas variedad a la música, hermanando aquella entrada en su harmoniosa salida lo vario y lo consonante ¿por qué no se ha de permitir…? » (« Que sont les règles en art, sinon les instruments et moyens pour arriver à leur finalité ?… Maintenant, je demande : Quelle est la finalité de la musique ? Toute personne qui n’est pas sourde répondra : la mélodie. Car si elle est obtenue, qu’importe qu’il y manque une règle établie par les anciens… ? Si l’on permet l’usage des espèces dissonantes parce qu’elles donnent davantage de variété à la musique, mariant cette entrée comme son harmonieuse sortie dans leur variété et leur consonance, pourquoi ne pourrait-on pas le permettre… ? »). C’est peut-être grâce à ce désir de liberté, que la musique de Valls nous interpelle toujours profondément. Il nous propose un discours musical qui est projeté de son intimité même, par un élan expressif global qui nous touche de manière substantielle : là où grâce et beauté forment un devenir indissociable, à travers une fusion totale de la mélodie, avec le soutien de l’harmonie et du contrepoint.
HENRY DESMAREST
Henry Desmarest (1661-1741), l’un
des plus talentueux compositeurs du règne de Louis XIV, successeur de
Charpentier au Collège des Jésuites de Paris, avait les faveurs de son
souverain tant pour sa musique religieuse (il avait été chanteur à la
Chapelle Royale) que pour ses opéras. Mais ayant décidé d’enlever sa
bien-aimée (mineure) contre la volonté du père de celle-ci, il fut condamné
à mort et dut s’exiler en 1699 pour échapper à la sentence. Lorsque le petit
fils de Louis XIV monta sur le trône d’Espagne en 1701 sous le nom de
Philippe V, il appela à ses côtés Desmarest comme Maître de la Musique de sa
Chambre pour imposer un style versaillais à sa cour, et le chargea de
recruter des musiciens français : Desmarest devint donc le Maître de la
Musique Française de la cour d’Espagne. A peine arrivé à Madrid en juin
1701, Desmarest dut suivre son roi à Barcelone pour son mariage avec Marie
Louise Gabrielle de Savoie où il resta avec une douzaine de musiciens
français d’août à fin décembre 1701, pour donner des divertissements à la
cour. Il semblerait que c’est à ce moment que Francesc Valls le célèbre
Maître de Chapelle de la Cathédrale de Barcelone, fit exécuter sa Missa
Scala Aretina (fin 1701). Desmarest eut sans doute le privilège d’entendre
cette messe fastueuse, et sans doute de rencontrer Valls, lors de son séjour
à Barcelone, ou du suivant en 1702. Mais le sort devait bien vite frapper
l’exilé : Philippe V revint d’Italie avec des goûts musicaux très italiens,
et décida de dissoudre sa musique française dont les musiciens trouvèrent à
s’employer dans les différents orchestres de la chapelle et de la cour.
Ballotté comme son roi par les rebondissements militaires permanents de la
guerre de succession d’Espagne, dans un moment où la Chapelle Royale de
Madrid était en pleine transformation et au cœur des jeux politiques,
Desmarest dut attendre sans réel emploi jusqu’en 1707, lorsqu’on fit appel à
ses services à la cour de Lorraine. Il devint surintendant de la musique à
la cour du duc Léopold 1er à Nancy et c’est donc en Lorraine que se déroula
le reste de sa carrière et de sa vie. Il y donna en primeur sa
resplendissante Messe à deux chœurs et deux orchestres (1707), qui fut
probablement composée en Espagne à la lumière des inspirations que lui
avaient communiquées les compositeurs locaux, et sans aucun doute la Missa
Scala Aretina de Valls.
Les messes à grand orchestre, et
encore plus à deux chœurs, à l’époque de Louis XIV sont extrêmement rares en
France : dans ce genre, comme l’indique Jean Duron « Marc-Antoine
Charpentier fait presque figure de cas isolé avec sa Missa “Assumpta est”
[H.11], (œuvre que nous avons enregistrée en 2004, également à la Chapelle
Royale du Château de Versailles, et que nous avons éditée en 2014 ; AV9905),
avec sa Messe pour M. Mauroy [H.6] et la très célèbre Messe de Minuit [H.9]
». L’existence de cette unique messe de Desmarest, nécessitant elle aussi
deux chœurs et deux orchestres, est dans ce contexte un événement digne
d’une attention particulière, spécialement si l’on constate qu’on ne trouve
aucune de ces caractéristiques chez les autres grands maîtres de ce temps
comme Lully, Du Mont ou Collase, ni chez Lalande ou Bernier. Comme le
signale Jean Duron « seules les messes des morts semblent avoir eu un sort
meilleur, puisque trois chefs-d’œuvre à peu près contemporains, sont
parvenus jusqu’à nous, dus à la plume d’André Campra, de Jean Gilles et de
Charpentier [H.10]. Il faut se rappeler que souvent les messes à grande
symphonie finissaient dans les bibliothèques musicales des chapitres
commanditaires qui ont pour la plupart été détruites durant la Révolution.
Par chance celle de Desmarest est parvenue jusqu’à nos jours, grâce aux
soins d’André Philidor, gardien de la bibliothèque musicale de Louis XIV et
peut-être aussi – car elle fut préservée – grâce à la volonté du comte de
Toulouse, fils du roi et de Madame de Montespan ».
Comme l’indique si bien encore
Jean Duron : « Que de soins en tout cas dans la réalisation de cette
partition : Philidor, aux pires moments de l’exil de Desmarest, avait su se
montrer, des années durant, toujours constant et ami fidèle, copiant les
œuvres profanes et sacrées du banni (après avoir été condamné à mort)…Dans
sa copie de la Messe, comme il le fit pour d’autre œuvres de Desmarest,
Philidor prit soin d’inscrire le nom de chacun des meilleurs et des plus
illustres artistes de la cour qui acceptèrent de jouer les œuvres du déchu :
en d’autres lieux, en d’autres temps, on pourrait presque voir dans cette
liste d’artistes prestigieux une sorte de pétition pour implorer le clémence
du monarque ! » Cette extraordinaire Messe à deux chœurs et deux orchestres nous montre tout le génie de notre compositeur : maîtrise spectaculaire du contrepoint et des séquences harmoniques, construction imposante des différentes parties de la messe, alternées d’admirables symphonies réunissant les deux orchestres et qui ouvrent le Kyrie, le Sanctus et l’Agnus Dei, émouvant contrastes entre la déclamation chorale des textes dans les passages du Gloria; entre Adoramus te « Lentement » et Glorificamus te « Vite », et aussi durant le Credo ; entre Simul adoratur « Lentement » et et Conglorificatur « Viste », et à la fin entre Pleni sunt cæli et terra « Lentement » et Hosanna in excelcis « Viste », sans oublier le bouleversant Crucifixus et l’émouvante construction polyphonique à 8 voix du Et incarnatus est.
MUSIQUES DE LA MÉMOIRE DU PEUPLE
Pour compléter le CD de Valls,
nous avons ajouté des « Musiques du temps des Guerres entre l’Espagne et la
Catalogne » ; d’abord la « Batalla Imperial » de Kerll/Cabanilles, qui sert
d’introduction à trois chants anciens, que chantait le peuple en Catalogne à
la même époque qu’on chantait les messes de Valls et de Desmarest. La chanson patriotique El cant dels aucells quant arribaren los vaixells (« Le chant des oiseaux voyant accoster les navires » de l’archiduc) emprunte la très ancienne et très belle mélodie du El Cant dels ocells (Chant des oiseaux). Ce chant qui célébrait la naissance de l’enfant Jésus, devient un chant patriotique en célébrant ici l’arrivée des bateaux de guerre de l’archiduc. Un autre célèbre chant traditionnel et patriotique est celui d’Els Segadors (Les faucheurs). Il nous raconte, en forme de romance, la « révolte des faucheurs ». Nous l’interprétons aussi dans une version instrumentale et une autre vocale correspondant à l’actuel Hymne National de Catalogne. Pour finir nous avons choisi l’ancienne lamentation Catalunya en altre temps (La Catalogne en d’autres temps), qui se chantait durant les années qui ont suivi la chute de Barcelone et la reddition de la Catalogne. Ici la mélodie d’une ancienne plainte amoureuse, sert de base à une version musicale, (réalisée et harmonisée par moi-même), qu’intègre un texte de protestation politique de l’époque, qui nous raconte en forme de plainte, que la « Catalogne en d’autres temps/ se gouvernait elle-même,/ et faisait ses propres lois/ dans sa langue et non une autre./ Pleure, pleure Catalogne,/ que tu ne te gouvernes plus ! ». Ce sont finalement des chants de la mémoire d’un peuple, des musiques qui nous racontent la vie et les espoirs de ces hommes et de ces femmes qui, au risque de leurs vies et de leurs biens, ont eu le courage de vouloir défendre leur culture et leur liberté.
JORDI SAVALL
Utrecht, 30 août 2017 IN EXCELSIS DEO
In this programme “IN EXCELSIS DEO” in the Time of the War of the Spanish Succession, two Masses, Missa “Scala Aretina” à quatre chœurs by the Catalan composer Francesc Valls (1671-1747) and Messe à deux chœurs et deux orchestres by the French composer Henry Desmarest (1661-1741), are presented side by side: two exceptional master-pieces which are linked in time and by the history of the nascent 18th century, but which are less well known than they deserve to be by today’s 21st century audiences. Indeed, these rare works, created by two of the greatest composers of Catalonia and France (they belong to the same generation, Valls being ten years Desmarest’s junior), are linked by the history of conflict between the French and Spanish crowns during the War of the Spanish Succession which began in 1701.Valls’s Missa Scala Aretina,composed in Barcelona at the end of 1701, was performed at the beginning of 1702, whilst Desmarest’s Mass was composed around 1704, just after his stay in Barcelona. The Missa Scala Aretina was performed for the first time at Barcelona Cathedral, whilst the Mass à deux chœurs was probably first performed at the Royal Chapel of Versailles (certainly after 1704, bearing in mind Philidor’s list of musicians taking part in the performance, in which he mentions the names of singers of the royal chapel and court instrumentalists). It was at the height of the terrible war between pro-Bourbon and pro-Habsburg factions in Spain and Catalonia, in which the Spanish and French troops supporting Philip V were pitted against the Catalan and Austrian troops of Archduke Charles of Austria, who were supported by the people of Catalonia in a bid to retain their freedom.
The idea of bringing together in a single programme these two marvellous Masses grew out of our regular collaboration over the past several years with the Château de Versailles and Laurent Brunner, its artistic director and director of “Festival Château de Versailles Spectacles”. It was he who suggested the programme: sharing his passion for both French and Catalan and Spanish music, I immediately accepted the challenge with great enthusiasm. First of all, we set about considering how the project might take shape. To begin with, I had the support of the CIMA Foundation (Centre Internacional de Música Antiga),with whom we carried out all the necessary research, while with our chorus master, Lluís Vilamajó, we selected the vocalists (from La Capella Reial de Catalunya), and with Manfredo Kraemer, concertino of the orchestra Le Concert des Nations, we decided on the instrumentalists required in the line-up for each of the two works. The rest was possible thanks to an efficient collaboration with the team of the Saline Royale d’Arc-et-Senans cultural centre and the support of its director, Hubert Tassy. It was at the extraordinary venue of the Saline Royale that we carried out the musical preparation for the project (from 26th to 29th June, 2016), before performing the programme for the first time at Dole Cathedral on 30th June, and on 2nd and 3rd July, 2016, during the concerts given at the wonderful Royal Chapel of Versailles, during which our sound engineer, Manuel Mohino, made the live recordingfeatured on this CD.
FRANCESC VALLS
The life of Francesc Valls (1671-1747), unquestionably one of the most emblematic Catalan composers of the Iberian Baroque, poses some unanswered questions, particularly as regards his date of birth and his musical training. Albeit without any real evidence, it has sometimes been stated that he spent time at Valencia, Mataró and Gerona, but we do know for certain that he succeeded Juan Barter at Barcelona Cathedral, where most of his works were performed. A key composer of Catalan music and more generally of Spanish music in his day, his works reveal a familiarity with the new musical trends from France, Italy and Germany. The Missa Scala Aretina, which rapidly became the subject of a great musical controversy (see the accompanying article by Josep Maria Gregori), was for decades the most keenly debated religious work of any Spanish composer. Having supported the archduke during the War of Succession, he was cast aside by the new regime after the fall of Barcelona on 11th September, 1714.
The presence of musicians from the archduke’s Austrian music chapel during the latter’s stay in Barcelona could account for certain parallels between Valls’s and Biber’s vocal and instrumental writing and line-up: Biber’s Missa Bruxellensis comprises 23 parts, of which 8 are distributed between two choirs of 4 vocalists each, while the remaining 15 parts are played by trumpets, violins and viols, oboes, cornets and sackbuts, organs and timpani. Valls’s Missa Scala Aretina, on the other hand, is scored for 11 parts, distributed among three choirs (of 3, 4 & 4 vocalists), plus 2 violins (doubled by oboes) and 1 violoncello, 2 organs, 1 harp and 2 trumpets (plus 1 violone and 1 timpani, added in keeping with the practice of the day). Despite these similarities to Biber’s great Mass, Francesc Valls’s genius is distinguished by its very personal character: a joyful, highly spontaneous style, invariably rich in effects and contrasts, the development of counterpoints in concertante passages between the solo parts or with the three choirs, alternating with sextets (Qui tollis peccata mundi) or quartets (Et incarnatus est) full of warmth and tenderness. Often woven together in unexpected ways, the polychoral passages and harmonies impress us with their modern, innovative character. Responding to criticism for having introduced a fourth voice in the Miserere nobis on an unprepared 9th chord, Valls justified his decision in the following terms: “What are rules in art, if not the instruments and means to achieve its purpose? And now, I ask, what is the purpose of music? Anyone who is not deaf will answer, ‘melody’. For if the latter is achieved, what does it matter if I fail to observe some rule laid down by theorists of the past? If we permit the use of dissonances because they lend more variety to the music, blending this entry with a harmonious exit through their variety and consonance, why should they not be allowed?”
It is perhaps because of this desire for freedom that Valls’s music continues to be profoundly relevant today. He offers a deeply personal and intimate musical discourse projected with an overall expressive vigour that is deeply moving, combining grace and beauty in a seamless whole through a total fusion of melody supported by harmony and counterpoint.
HENRY DESMAREST
Henry Desmarest (1661-1741), one of the most talented composers of the reign of Louis XIV and Charpentier’s successor at the Collège des Jésuites in Paris, enjoyed his sovereign’s favour, both for his religious music (he had been a page at the Royal Chapel) and his operas. However, having decided to abscond with his sweetheart (who was then a minor) against the wishes of her father, he was condemned to death and forced to go into exile in 1699 to escape the death penalty. When, in 1701, the grandson of Louis XIV ascended the Spanish throne as Philip V, he appointed Desmarest Master of his Chamber Music in order to establish the Versailles style at his court, instructing him to recruit French musicians. And so Desmarest became Master of the French Music at the Spanish court. No sooner had he arrived in Madrid in June, 1701, than Desmarest was called to follow his king to Barcelona for the monarch’s marriage to Maria Luisa of Savoy. He remained there, together with a dozen French musicians, from August to the end of December 1701, to provide entertainments at court. It was about that time, in late 1701, when Francesc Valls, the famous chapel master of Barcelona Cathedral, performed his Missa Scala Aretina. No doubt Desmarest had the privilege of hearing this sumptuous Mass, as well as meeting Valls either on that occasion or later, in 1702, during his stay in Barcelona. However, fate was soon to deal the exiled composer a blow: Philip V returned from Italy with a marked fondness for Italian musical tastes and decided to disband his French Music, whose musicians then had to find employment with the various orchestras of the music chapel and the court. Buffeted like his king by the constant military twists and turns of the War of the Spanish Succession, at a time when the Royal Chapel in Madrid was undergoing transformation and in the midst of political manoeuvring, Desmarest was left without any secure position until 1707, when he was called upon to serve at the court of Lorraine. He was appointed Superintendent of Music at the court of Leopold 1, Duke of Lorraine, at Nancy, and it was in Lorraine that he would spend the rest of his career and end his days. There he premiered his splendid Mass for two choirs and two orchestras (1707), which was probably composed in Spain, inspired by local composers and, no doubt, by Valls’s Missa Scala Aretina.
At the time of Louis XIV, Masses for full orchestra, and particularly those requiring two choirs, were extremely rare in France. Indeed, as Jean Duron points out, in this genre “Marc-Antoine Charpentier was almost an isolated case with his Missa “Assumpta est Maria” [H.11], (a work that we recorded in 2004, also at the Chapelle Royale at Versailles, which we released in 2014; AV9905), with his Messe pour M. Mauroy [H.6] and the famous Messe de Minuit [H.9].” In such a context, the existence of this unique Mass by Desmarest, also scored for two choirs and two orchestras, deserves special attention, particularly when we consider that none of these features are to be found in the other great masters of the period such as Lully, Du Mont and Collase, Lalande and Bernier. As Jean Duron observes, “only requiem masses seem to have fared better, since three more or less contemporary masterpieces by André Campra, Jean Gilles and Charpentier [H.10] have survived to the present day. It should be remembered that grand symphonic masses frequently ended up in the music archives of the cathedrals that had commissioned them, most of which were destroyed during the Revolution. Fortunately, Desmarest’s mass survived, thanks to the good offices of André Philidor, Louis XIV’s music librarian, and perhaps also – given that it was preserved – thanks to the son of Louis XIV and Madame de Montespan, the Count of Toulouse.”
As Jean Duron also rightly points out, “What painstaking care went into the preparation of this score: for years during the most difficult days of Desmarest’s exile, Philidor proved himself to be an unfailingly constant and faithful friend, copying the banished composer’s sacred and profane works after he had been sentenced to death… In his copy of the Mass, as in the case of other works by Desmarest, Philidor meticulously wrote the name of each of the finest and most eminent court artists who agreed to perform the disgraced composer’s works: at another time, in another place, this list of outstanding artists might be read as a kind of petition imploring the monarch’s clemency!” This extraordinary Messe à deux chœurs et deux orchestres reveals the full extent of Desmarest’s genius: a spectacular command of counterpoint and harmonic sequences; an impressive architecture in the different parts of the Mass, alternating with admirable symphonies in which the two orchestras are brought together to open the Kyrie, the Sanctus and the Agnus Dei; moving contrasts between the choral declamation of texts in the passages of the Gloria; between Adoramus te “Slow” and Glorificamus te “Quick”, as well as during the Credo; between Simul adoratur “Slow” and et Conglorificatur “Quick”, and at the end, between Pleni sunt cæli et terra “Slow” and Hosanna in excelsis “Quick”, not to mention the overwhelming Crucifixus and the moving, polyphonic 8-part fabric of Et incarnatus est.
MUSIC OF THE MEMORY OF THE PEOPLE
To complement this Valls CD, we have added “Music from the Time of the Wars between Spain and Catalonia”: first, “Batalla Imperial” by Kerll/Cabanilles, which serves as an introduction to three ancient songs sung by people in Catalonia during the same period in which Valls’s and Desmarest’s Masses were performed. The patriotic song El cant dels aucells quant arribaren los vaixells(Song of the birds on seeing the approach of the ships; of Archduke Charles) borrows the beautiful old melody of El Cant dels ocells(Song of the birds). This carol, which celebrates the birth of Jesus, was transformed into a patriotic song celebrating the arrival of the archduke’s battle ships. Another well-known traditional, patriotic song is Els Segadors (The Reapers), which recounts in ballad formthe “reapers’ revolt”. It is performed here in both an instrumental and a vocal version, the latter corresponding to the present-day national anthem of Catalonia. To conclude, we have chosen the old lament Catalunya en altre temps(Catalonia, in days gone by), which was sung in the years following the fall of Barcelona and the surrender of Catalonia. Here, the melody of an old love song provides the basis for a musical version (in my own arrangement) of a contemporary political protest, lamenting that “Catalonia, in days gone by,/ was ruled by her own hand,/ and her laws were written/ in a language no other than her own./ Weep, weep, Catalonia,/ for you rule yourself no more!”
These are the songs of the memory of a people, music that evokes the lives and aspirations of men and women who, risking their lives and all their possessions, had the courage to defend their culture and their freedom.
JORDI SAVALL Utrecht, 30th August, 2017
Translated by Jacqueline Minett | |
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