|
|
Le Père Batllori, insigne chercheur, grand humaniste et maître incontesté de l’histoire de cette famille, affirmait qu’il ne fallait faire de littérature ni noire ni rose sur les Borgia, mais que l’on devait simplement écrire l’histoire objective de ce qu’ils furent vraiment et de ce qu’ils firent. Avec ce nouveau Livre-CD consacré à cette remarquable « Dynastie », nous présentons, en nous appuyant sur les dernières conclusions des principaux chercheurs, certains des aspects essentiels de ce « qu’ils furent et firent ». Mais c’est sans oublier les ombres et les lumières qui les accompagnent et en étant bien conscients de la grande difficulté que suppose l’évocation de la vie et des actes de personnages historiques qui furent indissociablement marqués par une terrible et durable « légende noire ». Il s’agit de vies complexes et conflictuelles profondément enracinées dans un vaste ensemble de faits et d’événements que nous situerons dans leur contexte historique et musical. Il s’agit aussi d’une des périodes culturelles et politiques parmi les plus intenses de la civilisation européenne. À l’aube des temps modernes, cette période est marquée par le passage du monde médiéval à l’épanouissement de la Renaissance. C’est une époque de grandes découvertes géographiques et culturelles (depuis la civilisation grecque jusqu’au Nouveau Monde), une époque de grands conflits, depuis l’expulsion des Juifs de la Péninsule Ibérique jusqu’au schisme protestant, à l’apogée du conflit armé avec les Turcs et à l’extermination des Maures dans les royaumes hispaniques. Les principaux protagonistes de cette famille valencienne provenaient de Játiva (ville appartenant au royaume de Valence, l’un des territoires de la couronne catalano-aragonaise). Leurs vies s’écoulent depuis 1400 – c’est-à-dire peu avant la fin du schisme d’occident (1417) et la conquête de Constantinople par les Turcs (1453) – jusqu’à la victoire de l’armée catholique face aux Turcs à la bataille de Lépante (1571), au terrible massacre de la Saint-Barthélemy et à la mort à Rome de François Borgia, dernier grand représentant de la famille, événements qui se produisirent en 1572. Les Borgia/Borja vécurent en un temps fortement marqué par une lutte féroce et constante pour le pouvoir spirituel et séculier de Rome, centre névralgique de toute la chrétienté et siège de l’état du Vatican. Dès l’époque médiévale, le pouvoir de la papauté était au-dessus de tous les pouvoirs séculiers ; un roi excommunié par le pape perdait son pouvoir de droit divin pour gouverner et seul le chef de la chrétienté pouvait couronner empereur un roi chrétien. Comme ce fut le cas pour Clément VII et Charles Quint en 1530. Nous devons aussi nous souvenir que les méthodes politiques et les mœurs sociales de la vie ecclésiastique dans la Rome de ces temps, étaient fort différentes de celles que nous connaissons actuellement. À l’époque (XVe et XVIe siècles), la double vie contradictoire, humaine et religieuse, menée par une partie importante du clergé était connue de tous, à l’inverse d’aujourd’hui où, depuis de longues années, on a cherché à la nier, ou même à la réduire au silence. Les deux papes Borgia n’ont fait que continuer les us et coutumes de leur temps, basés sur le Népotisme et le Paternalisme, tout particulièrement Alexandre VI, dont on sait qu’il eut neuf enfants : Girolama, Isabel et Pedro Luis de mère inconnue, Juan, Lucrèce, César, et Geoffroy de sa première maîtresse Vanozza Cattanei et deux autres enfants de sa troisième maîtresse « stable », Julie Farnèse. Par ailleurs, les conditions dangereuses de la vie au Vatican à l’époque obligeaient à s’entourer d’un maximum de membres de sa famille, car – par exemple – pouvoir manger un plat, cuisiné par une personne de toute confiance, était une condition indispensable à la survie. Nous sommes donc face à des personnalités d’envergure universelle qui, au-delà de leurs grandioses contradictions, de leurs nombreuses faiblesses d’hommes, eurent des existences exubérantes quoique pleines d’ombres, de violences et d’intrigues machiavéliques (Machiavel s’inspira des comportements d’Alexandre VI et surtout de César Borgia pour écrire « Le Prince »). Mais ils furent aussi de grands défenseurs du pouvoir suprême de l’Eglise, de l’indépendance politique et territoriale du Vatican et d’habiles négociateurs dans les domaines politiques et militaires. Protecteurs des Humanistes et des juifs séfarades (accueillis à Rome malgré les protestations de l’ambassadeur des Rois Catholiques), Calixte III et plus encore Alexandre VI furent également de grands mécènes des arts et de la musique. Mais ces activités furent entachées par leurs mœurs discutables, leurs méthodes violentes et leurs faiblesses charnelles extrêmes qui donnèrent lieu à la naissance d’une terrible légende noire. Cette mauvaise réputation qui alla en augmentant jusqu’à la mort d’Alexandre VI a perduré à travers les siècles en déformant notre vision objective de la réelle histoire des Borgia. Il ne faut pas oublier que cette légende se créa et se développa à partir d’une vie peu compatible avec les principes et l’exemple que l’on aurait pu attendre de la part de celui qui représentait sur terre le chef spirituel du christianisme. Cette vie fut trop souvent maculée de sang (assassinats) ponctuée de multiples actes violents (vengeances),dépravée (orgies et bacchanales) et même sacrilège (tournois sexuels dans les appartements de la papauté durant les fêtes du jour des morts). Quoique très excessifs ces faits n’en étaient pas pour autant si différents de ce qui se passait au sein des autres noblesses italiennes. Et ces faits réels furent encore assombris par des accusations exagérées ou fausses, souvent lancées à l’opinion publique en réaction défensive ou en représailles à des actions ou des décisions politiques qui avaient causé un préjudice aux principaux clans détenant le pouvoir dans l’Italie de cette époque. Peu nombreux sont les personnages du passé qui ont souffert d’une déformation de la réalité historique aussi systématique et durable que les Borgia. Tout particulièrement Alexandre VI et ses deux descendants les plus célèbres : César et Lucrèce. Peu nombreux sont aussi ceux qui peuvent illustrer de façon si extrême la relation conflictuelle entre le monde de l’Eglise, en tant qu’institution et celui des sphères des pouvoirs séculier et spirituel. Ces réalités interviennent au moment précis où la société européenne voit surgir un épanouissement artistique et un débat spirituel et intellectuel aussi spectaculaires que novateurs qui, inspirés par la découverte de la civilisation grecque, se cristalliseront dans la pensée Humaniste et un développement créatif configurant l’abandon du monde médiéval pour faire place à une véritable « Renaissance » culturelle et sociale. Le premier Borgia célèbre, Alphonse Borgia accompagna Alphonse le Magnanime dans sa conquête de Naples, puis s’installa à Rome où il fut couronné pape sous le nom de Calixte III en 1445. Son règne, outre sa priorité à récupérer Constantinople, fut marqué par une politique d’un caractère humaniste. Il fut en effet considéré par Eneas Silvio Piccolomini comme un « excellent lettré » et son amitié profonde pour le latiniste distingué Lorenzo Valla (1407-1457) est avérée. Le cas de Rodrigue Borgia est sensiblement différent de celui de son oncle Alphonse et dans presque tous les domaines. Sa réputation détestable ne doit pas nous faire oublier cependant qu’il fut l’un des mécènes les plus remarquables de la Renaissance italienne. Il ne fut ni un grand intellectuel ni un humaniste de grand succès mais son amitié pour les humanistes et son appui favorable au développement des arts, des lettres et des sciences est incontestable. Comme l’affirmait Gregorovius (1877) « toute inculture était éloignée d’Alexandre VI ». Parmi les grands génies de l’époque, soutenus par Alexandre VI ou en relation avec lui, figurent Josquin des Prez. Il est le plus important de ses musiciens préférés et composa le sombre et dramatique motet à quatre voix graves «Absalon Fili mi», en hommage à Juan de Borja, fils aîné du pontife, deuxième duc de Gandie et brutalement assassiné en 1497. Il faut aussi signaler Nicolas Copernic (1500), Léonard de Vinci (1502-1503) ou Michel Ange (1500). Des nombreux enfants d’Alexandre VI, nous sélectionnerons trois d’entre eux : Juan, César et Lucrèce, qui furent plus proches de leur père. César, malgré une propension nulle à l’état ecclésiastique, fut nommé archevêque de Valence à l’âge de dix-sept ans et cardinal à dix-huit. Profitant de la mort de son frère en 1497, il occupa la place d’héritier des Borgia en Italie. Nommé alors Capitaine général des armées pontificales, modèle du Prince de Machiavel, César Borgia synthétise, dans ses trente-deux ans de vie, la turbulence d’une époque de luttes sans merci pour le contrôle du pouvoir séculier et spirituel. Un halo sulfureux entoure Lucrèce, la sœur de César. Les calomnies répandues par les ennemis de son père Alexandre VI – elle fut accusée de double inceste – a séduit l’imagination de beaucoup pendant des siècles. Admirée par les grands esprits de son temps (Bembo, le Titien et l’Arioste) Lucrèce symbolise la force de la femme de la Renaissance par sa beauté, son intelligence, son sens politique, son talent et sa générosité de mécène autant que par sa sensibilité sociale, car à Ferrare ses sujets l’appelaient « la mère du peuple ». Il ne s’agit donc pas de l’héroïne romantique qui nous a été présentée mais plutôt de la véritable antagoniste des tragédies qu’elle fut contrainte de vivre. François Borgia, arrière-petit-fils d’Alexandre VI par son père et du roi Ferdinand le Catholique par sa mère fut protégé par l’empereur Charles Quint qu’il servit fidèlement à sa cour. La mort de l’Impératrice Isabelle du Portugal en 1539 marqua un profond changement dans sa vie dont il consacra le restant à une austère et militante pratique de sa religiosité, en entrant dans la Compagnie de Jésus, après un court épisode en tant que vice-roi de Catalogne. Il devint un grand réalisateur et bienfaiteur de projets éducatifs et spirituels et son évolution religieuse culmina avec sa nomination en tant que Général des Jésuites dont il fut le troisième (1565). Il fut alors envoyé par le pape Pie V pour d’importantes missions diplomatiques, comme celles qu’il accomplit auprès des maisons royales de Madrid et de Lisbonne, ou comme la dernière d’entre elles, qui le mena à Blois auprès de Catherine de Médicis où, n’eût été sa maladie mortelle, il aurait peut-être pu empêcher le terrible massacre de la Saint-Barthélemy en 1572. Il s’arrêta en effet pour se reposer à la cour de son oncle Hercule d’Este (fils de Lucrèce Borgia) et mourut à Rome le 30 septembre de la même année. Il fut béatifié en 1624 par Urbain VIII. Et un an avant le centenaire de sa mort, en 1671, François Borgia était canonisé par le pape Clément X. Parmi
l’importante production historique et littéraire dédiée aux Borgia/Borja, il
existe peu de références qui nous parlent avec pertinence du contexte
musical de la dynastie des Borgia, à l’exception de certaines études
spécialisées comme les Studien zur Geschichte der Papstlichen Kapelle, de
Bernhard Janz. Il convient de mentionner parmi ces exceptions l’œuvre de
Maria Bellonci consacrée à Lucrèce Borgia, pour ses nombreux et méritoires
détails relatifs à la pratique musicale. Il faut également citer
l’intéressante étude de Vicent Ros, La Música i els Borja, éditée avec une
importante sélection d’articles, Els Temps dels Borja, et plus récemment la
nouvelle et passionnante biographie historique de Josep Piera Francesc de
Borja, el duc sant. Comme dans les précédents projets de Livre/CD, nous avons divisé les différentes étapes de la « Dynastie Borgia » en sept chapitres qui vont de la Valence musulmane du XIIIe siècle jusqu’à la canonisation de François Borgia en 1671. La 1ère Partie traite de : Les chemins
vers le pouvoir : origines et expansion d’une dynastie. 1238 – 1492 La 2ème
Partie se centre sur les années de la papauté d’Alexandre VI : IV. Temps de révoltes et d’humanisme. Et la 3ème Partie est le passage : (CD 3) Du règne convulsif d’Alexandre VI au triomphe spirituel de François Borgia. 1671 V. Batailles et trêves : responsabilités militaires et politiques. VI. Renoncements et transformation spirituelle. VII. Dernières années et mort de François Borgia. Sa canonisation. Cet ample parcours historique nous permet de montrer la richesse musicale de l’environnement des Borgia et de leur temps, avec les musiques les plus représentatives provenant des chansonniers de Montecassino, Palacio, Duque de Calabria et Gandia. Ces œuvres sont signées des plus grands compositeurs hispaniques (Johannes Cornago, Cristóbal de Morales, Lluis del Milà, Bartomeu Cárceres, Mateo Flecha et Joan Cabanilles, incluant le Credo de la Messe attribuée à François Borgia lui-même, comme exemple d’un art plus populaire). Elles sont aussi signées par des compositeurs européens de la même époque (Gilles Binchois, Guillaume Dufay, Josquin des Prez, Henrich Isaac, Claude Goudimel). Ce sont souvent des œuvres composées pour une occasion concrète, pour célébrer une victoire, une bataille ou une trêve, pour le couronnement d’Alexandre VI ou pour déplorer la mort d’un personnage important (Johannes Ockeghem, Laurent le Magnifique ou l’Empereur Maximilien…) Cette fresque musicale est complétée par des textes récités : des témoignages poétiques, des éloges, des critiques, y compris le terrible ban d’expulsion des Maures de 1609. La beauté et l’émotion de ces musiques donnent une nouvelle vie aux moments phares d’une époque convulsive et extraordinaire et nous rapprochent d’une façon plus objective et émouvante de la réalité sociale et culturelle du temps de la Dynastie des Borgia. JORDI SAVALL
Traduction : Irène Bloc
|
|
ENGLISH VERSION
The celebration of the 500th anniversary of the birth of St Francis Borgia (Gandia 1510 – Rome 1572), the last of the illustrious members of the “Borgia Dynasty,” prompted us to embark on the present historical and musical project, recalling the most significant events of the age in which the chief protagonists of this extraordinary and fascinating family lived: Alfonso de Borja (Callistus III), Rodrigo de Borja (Alexander VI), Giovanni Borgia, Cesare Borgia, Lucrezia Borgia and St Francis Borgia. Fr Batllori, the outstanding scholar, humanist and indisputable expert in the history of the Borgias, remarked that the Borgias should not be made the subjects of crime fiction or romance. Instead, what is needed is simply an objective account of who they were and what they did. Informed by the latest findings of the leading specialists in the field, in our new CD-book devoted to the Borgia “Dynasty” we present some of the essential aspects of ”who they were and what they did” without glossing over the ups and downs of their chequered careers. In doing so, we are aware of the great difficulty of evoking the lives and exploits of these historical figures who were indelibly marked by a terrible and persistent “black legend.” They lived complex and turbulent lives that were deeply enmeshed in a vast web of historical facts and events which we place within their specific historical and musical context: one of the most intense cultural and political periods of European civilization, on the threshold of modern times, distinguished above all by the transition from the medieval world to the cultural and humanistic flowering of the Renaissance. A time of great cultural and geographical discoveries, from Greek civilization to the New World, and also of major conflicts, from the final stages of the Reconquest and the expulsion of the Jews from the Iberian Peninsula to the beginning of the Protestant schism and inevitable war with the Turks. The story of the chief protagonists of this Valencian family, surnamed Borja, whose origins can be traced to Játiva (a town in the kingdom of Valencia, one of the territories of the Catalano-Aragonese Crown), spans the period from 1400, just before the end of the Western Schism (1417) and the conquest of Constantinople by the Turks (1453), to the victory of the Christian armies against the Turks at the Battle of Lepanto (1570), followed two years later, in 1572, by the terrible St Bartholemew’s Day massacre and the death in Rome of St Francis Borgia, the last great member of the dynasty. The Borgias lived in an age rocked by a fierce and unremitting struggle for the spiritual and worldly power of Rome, the core of all Christendom and centre of the Vatican state. From medieval times the power of the Papacy had taken precedence over all secular powers. If a king was excommunicated by the Pope, he lost his divine right to rule; and only the Pope, as head of the Christian Church, had the authority to crown a Christian king as Emperor, as Pope Clement VII crowned Charles V in 1530. It should also be borne in mind that the political methods and social customs of ecclesiastical life in Rome at that time were very different from those of today. In those days the contradictory human and religious double life led by much of the clergy was common knowledge – a far cry from our own times, in which those double standards have long been denied and even silenced. The two Borgia Popes, therefore, merely continued to act and behave according to customs based on nepotism and paternalism, particularly in the case of Alexander VI, who is known to have fathered more than nine children: Girolama, Isabella and Pier Luigi by an unknown mother, Giovanni, Lucrezia, Cesare, and Goffredo by his first mistress, Vannozza Cattanei, and another two children by his third “long-term” mistress, Giulia Farnese. The dangerous conditions of life in the Vatican at that time meant that the Pope needed to surround himself with as many members of his own family as possible, since eating a dish prepared and served by a trusted kinsman, for example, could be the indispensable key to survival. These towering figures, with their massive contradictions and many human weaknesses, led exuberant lives obscured by violence and Machiavellian intrigues (in writing The Prince Niccolò Machiavelli took his inspiration from the conduct of Alexander VI and, above all, Cesare Borgia); but they were also great champions of the supreme power of the Church and the political and territorial independence of the Vatican, as well as skilled negotiators in all political and military matters. As well as offering their protection to humanists and the Sephardic Jews (who had found refuge in Rome, despite the protests of the ambassador of the Catholic Monarchs), Callistus III and, above all, Alexander VI were also great patrons of music and the arts, although this latter activity has been inevitably been tainted by the memory of their questionable mores, violent methods and extreme weakness of the flesh, which gave rise to a terrible Black legend which continued unabated until the death of Alexander VI and has echoed through the centuries, thus distorting our objective view of the true history of the Borgias. Let us not forget that this Black Legend was gradually forged and developed out of lives that were hardly compatible with the principles and exemplary behaviour desirable in the spiritual head of Christianity on earth. Lives that were too often stained with blood and numerous acts of violence (murders and vendettas), depraved (orgies and drunken revelries) and even sacrilegious (sexual skirmishes in the Pope’s private quarters during All Souls’ Day festivities). Despite such excesses, the Borgias’ behaviour was not so different from that of other Italian nobles. Apart from these actual events, the lives and reputation of the Borgias were further blighted by false or exaggerated accusations, often spread by the dominant clans in Italy at that time to whip up public opinion as a means of self-defence or revenge for political acts and decisions which had damaged their interests. Few historical figures have suffered such a systematic and enduring deformation of objective reality as the Borja/Borgia family, and particularly Alexander VI and his two most famous offspring – Cesare and Lucrezia. And few provide such a stark and extreme illustration of the fraught relationship between the Church, as an institution, and the spheres of secular and spiritual power, especially at a time when European society was witnessing an explosion of artistic activity and a spectacular new spiritual and intellectual debate inspired by the discovery of Greek civilization, which was to crystallize in humanist thought and a creative development which shaped the emergence from the medieval world to a true cultural and social Renaissance. The first illustrious Borgia was Alfonso de Borja, who accompanied Alfonso the Magnanimous in the conquest of Naples and later took up residence in Rome, where he was crowned Pope Callistus III in 1445. His papacy was distinguished by his determination to win back Constantinople (which became Istanbul in 1453), as well as the humanist nature of his policies. He was described by Eneas Silvio Piccolomini as “a most excellent gentleman of letters”, and he is known to have maintained a close friendship with the distinguished Latin scholar Lorenzo Valla (1407-1457). The case of Rodrigo de Borja is different in almost every respect from that of his uncle Alfonso. His terrible reputation, however, should not blind us to the fact that he was one of the foremost patrons of the Italian Renaissance. Although he was neither a great intellectual nor a particularly outstanding humanist, he numbered humanists among his friends and he did a great deal to foster the development of the arts, letters and sciences. In the words of Gregorovius (1877) “Alexander VI was nothing if not cultured.” Among the great geniuses of the age who collaborated or were in some way connected with Alexander VI, we should mention Josquin des Prez (the most outstanding of his favourite musicians, who composed the sombre, dramatic 4-part motet “Absalon Filii mi” as a tribute to the Pope’s eldest son Giovanni Borgia, Second Duke of Gandia, who had been brutally murdered in 1497), Nicolaus Copernicus (1500), Leonardo da Vinci (1502-1503) and Michelangelo (1500). Among Alexander VI’s numerous children, we shall focus especially on those who were closest to their father: Giovanni, Cesare and Lucrezia. The firstborn, Giovanni di Gandia, was murdered in 1497, one year after returning to Rome. Cesare, who in spite of being devoid of any inclination for the ecclesiastical life, had been appointed archbishop of Valencia at the age of seventeen and cardinal at eighteen, became heir and head of the Borgia family in Italy when his brother Giovanni died in 1497. Subsequently appointed captain general of the papal army and the model for Machiavelli’s The Prince, in his thirty-two years of life Cesare Borgia was the living expression of the turbulence of a period scarred by conflict and bitter struggle for the control of secular and spiritual power. Cesare’s sister Lucrezia is surrounded by a sulphurous halo. For centuries the calumnies spread by the enemies of her father Alexander VI – she was accused of double incest – have captured the popular imagination. Admired by the greatest geniuses of her day, including Bembo, Titian and Ariosto, Lucrezia symbolizes the power of Renaissance woman, with her beauty, her intelligence, her shrewd political sense, her talent and generosity as a patron, and her social awareness (in Ferrara her subjects called her “the mother of the people”). Far from being the romantic heroine that we had been led to believe, she was the true antagonist of the tragedies that framed her life. On his father’s side the great-grandson of a Pope of Rome, and on his mother’s side the great-grandson of the King of Aragon, Francis Borgia was a protégé of Emperor Charles V, whom he served faithfully at court. The death of Empress Isabella of Portugal in 1539 marked a profound turning point for Francis and, following a brief period as viceroy of Catalonia, he devoted the rest of his life to the austere and militant practice of his faith as a member of the Society of Jesus, becoming a great benefactor and instigator of numerous educational and spiritual projects. In 1565 his religious career culminated in his being appointed the third Vicar General of the Society of Jesus. Sent by Pope Pious V on an important diplomatic mission to the royal houses of Madrid and Lisbon, his final mission took him to Blois, where he was granted a royal audience with Catherine de’ Medici. Had it been successful, it would probably have prevented the St Bartholemew’s Day massacre in August 1572. As those terrible events unfolded, Francis Borgia rested in Ferrara at the court of his uncle Ercole d’Este, the son of Lucrezia Borgia. On 30th September of that same year, Francis Borgia died in Rome. In 1624 he was beatified by Urban VII and, in 1671, just one year before the centenary of his death, he was canonized by Pope Clement X. Except for specialist studies such as Studien zur Geschichte der Papstlichen Kapelle by Bernhard Janz, the huge number of historical and literary works devoted to the Borjas/Borgias contain very few references to their musical context. Among the few exceptions which deserve special mention because of the wealth of detail that they provide on musical practice, are Maria Bellonci’s writings on Lucrezia Borgia, Vicent Ros’s interesting study entitled La Música i els Borja, published together with an interesting selection of articles on the age of the Borgia, entitled Els Temps dels Borja, published in 1996 by Játiva City Hall and the Generalitat of Valencia, and Josep Piera’s fascinating new historical biography entitled San Francesc de Borja, sant i duc de Gandia. We would also like to draw the reader’s attention to the importance of a number of studies, some classic and others more recent, which have helped to restore the balance and offer a more objective view of the Borgias, such as those written by Fr Miquel Batllori and, more recently, Joan Francesc Mira, Óscar Villarroel González and Santiago La Parra López. As in our previous CD-book projects, we have divided the various stages of the “Borgia Dynasty” into seven chapters, from 13th Century Muslim Valencia to the death and canonization of Francis Borgia in 1671. Part I deals with Part II focuses on the
years of the reign of Pope Alexander VI; And Part III deals with the
passage from This broad historical sweep allows us to demonstrate the musical richness surrounding the Borgias and their period through a selection of the most representative works from the Cancionero de Montecassino, Cancionero de Palacio, Cancionero del Duque de Calabria and Cancionero de Gandía. Written by the greatest Hispanic composers of the age (Johannes Cornago, Cristóbal de Morales, Lluís del Milà, Bartomeu Cárceres, Mateo Flecha and Joan Cabanilles, including the Credo from the Mass attributed to St Francis Borgia himself, as an example of a more popular musical style), as well as those written by their European contemporaries (Gilles Binchois, Guillaume Dufay, Josquin des Prez, Heinrich Isaac, Claude Goudimel), in many cases to mark a specific occasion, such as the celebration of a military victory, a battle or a truce, or the coronation of Pope Alexander VI, or to lament the death of outstanding figures such as Johannes Ockeghem, Lorenzo the Magnificent and Emperor Maximilian, etc. The musical programme is complemented by the recitation of a number of poetic testimonies, eulogies and critical accounts, including the terrible decree of the expulsion of the Moriscos in 1609. The beauty and the emotion of this music brings some key moments of that convulsed and extraordinary period back to life, offering us a thrilling and, at the same time, a more objective view of the social and cultural context of the age of the Borgia Dynasty. JORDI SAVALL Translated by Jacqueline Minett
| |
|
|
|
|
Cliquez l'un ou l'autre
bouton pour découvrir bien d'autres critiques de CD |