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The man that hath no music in himself, Nor is not moved with concord of sweet sounds, Is fit for treasons, stratagems, and spoils; The motions of his spirit are dull as the night, And the affections dark as Erebus Let no such man be trusted. Mark the music. William Shakespeare, The Merchant of Venice, Act V, Scene 1 L’homme qui n’a pas de musique en
lui, William Shakespeare, Le Marchand de Venise, Acte V, scène 1 Si le visage est le miroir de l’âme, la musique d’un peuple, est le reflet de l’esprit de son identité, à l’origine individuelle mais, qui prend forme dans le temps en tant qu’image de l’ensemble d’un espace culturel propre et unique. Toute musique transmise et conservée par tradition orale, est le résultat d’une heureuse survivance, suite d’un long processus de sélection et de synthèse. A l’inverse de certaines cultures orientales qui se sont surtout développées dans un espace de tradition orale, dans le monde occidental, seules les musiques dites traditionnelles, populaires ou folkloriques, ont su perdurer grâce à ces mécanismes de transmission non écrite. L’invention de la notation musicale qui est un phénomène lié très souvent aux cercles sociaux littéraires, a permis que certaines cultures, comme celles de Chine, de Corée, du Japon et d’Europe occidentale aient pu développer, depuis des temps très anciens, de nombreux systèmes de notation servant à des situations bien différentes. Tandis que d’autres cultures, comme celles des pays du Moyen Orient (exceptée la Turquie) ou le sud et le sud-ouest de l’Asie, ne l’ont que très peu développée – avant ces cent dernières années. Dans le monde des musiques « cultes » de l’Europe occidentale, la communication musicale basée sur le non écrit, a perduré jusqu’à la fin du XVIIe siècle, mais seulement dans les pratiques liées à l’improvisation et à la réalisation des accompagnements sur la « basse continue », et plus tard dans les espaces de création musicale, liés toujours à ceux des institutions du pouvoir spirituel et séculaire (l’Église et la Cour), depuis le XVIIe siècle (Angleterre) et surtout au XIXe siècle (Allemagne), dans les cercles éminemment bourgeois. L’écriture musicale a permis un formidable développement des formes et des instruments, mais en même temps elle a contribué à reléguer dans l’oubli et dans un espace secondaire toutes les musiques vivantes qui accompagnaient quotidiennement la vie du plus grand nombre ; celles du peuple. C’est pourquoi les musiques celtiques pour le « fiddle » ou violon, d’Ecosse et d’Irlande (et même celles provenant des communautés d’émigrants de ces pays en Amérique du Nord), constituent dans l’Europe occidentale, un cas unique. C’est l’un des plus riches et des plus beaux patrimoines de toutes les traditions musicales vivantes de notre temps. Tous ces milliers d’Airs, de Pastorals, Laments, Hornpipes, Reels, Rants, Jigs etc. conservés par les différentes traditions orales, transmises avec amour de père en fils et avec persévérance, d’une génération à l’autre, sont en réalité de véritables musiques survivantes. Ce sont, en effet, des musiques qui ont eu le privilège, et la chance pour nous, de survivre à l’inévitable et constante amnésie culturelle de l’homme et de ses folies globalisantes. De même que j’ai été séduit et fasciné, en 1965 pour retrouver la voix oubliée de la viole de gambe, de la même manière, nous avons décidé avec Montserrat Figueras et Hespèrion XX, (déjà en 1975), – dès nos premiers concerts et enregistrements – d’incorporer à côté du répertoire des musiques de la Cour et de l’Église, les merveilleuses musiques des Juifs espagnols, expulsés brutalement en 1492, et conservées par tradition orale, pendant plus de 5 siècles, dans les différentes communautés séfarades installées dans le pourtour méditerranéen. Il faut rappeler que sauf quelques exceptions (Falla, Bartók, Villa-Lobos, Kodaly, etc.), l’injuste valorisation de ces musiques dites « populaires » ou « folkloriques », les a reléguées inévitablement dans un univers propre, sans beaucoup de communication, ni surtout de respect de la part du monde de la musique dite « classique ». D’autre part, la terrible amnésie due à la perte de conscience des anciennes pratiques, nous a souvent empêchés de comprendre la réelle valeur d’œuvres conservées seulement dans leur version mélodique, même celles de musiciens très reconnus comme O’Carolan ou d’autres. C’est pourquoi dans de très importants dictionnaires de musique, on peut lire à propos des œuvres de O’Carolan que « unfortunately most are only in single line form, so that it is not definitely known how he harmonized or accompanied his melodies » (« malheureusement, la plupart n’existent que dans leur version mélodique, donc on ne peut savoir avec certitude de quelle manière s’harmonisait ou s’accompagnait ses mélodies »). Il est sûr que c’est dommage de ne pas savoir de quelle manière exacte on a réalisé l’accompagnement de telles pièces, mais il ne faut pas oublier que dans nombre de ces pièces la seule mélodie, grâce à sa beauté et son émotion, se suffit à elle même. Et en même temps, il faut constater que dans le cas de pièces qui demandent de l’accompagnement, nous en savons assez aujourd’hui sur la pratique de l’accompagnement improvisé aux XVIIe et XVIIIe siècles pour pouvoir reconstituer des versions pleinement satisfaisantes artistiquement. C’est pour la même raison que les six Suites pour violoncelle seul de J.S. Bach ont été « complétées » par un accompagnement pour piano durant le XIXe siècle et que comme musique d’art, elles sont restées « oubliées » des interprètes pendant plus de deux siècles. Il faut attendre jusqu’à la fin du XIXe siècle, pour qu’elles soient redécouvertes (en 1890!) par un jeune Pau Casals qui, dix années plus tard vers 1900, commencera à les faire connaître au monde. Ma première rencontre avec la musique celte remonte d’une part aux années 1977-78, au moment de notre visite à Kilkenny pour un concert avec Hespèrion XX. Durant ce Festival, les rues, les places et les pubs étaient remplis de musiciens de toutes sortes (violons, flûtes…) qui jouaient sans arrêt, seuls ou accompagnés (d’une guitare ou d’une petite harpe). Quelle vitalité, quelle magie de voir tant de musiciens, vivre la musique avec intensité et émotion ! D’autre part, l’autre rencontre s’est faite à travers l’écoute d’enregistrements historiques des années 1920-30, comme ceux des géniaux James Scott Skinner et Joe MacLean, et l’écoute de concerts d’ensembles comme « The Chieftains » entre autres. Pendant ces dernières trente années, j’ai été aussi absolument fasciné par le répertoire britannique pour la viole, ce pourquoi j’ai étudié, interprété et enregistré beaucoup de ces musiques pour viole seule ou pour consort de violes : celles de Christopher Tye à Henry Purcell en passant par Tobias Hume, Alfonso Ferrabosco, William Corkine, William Brade, John Dowland, William Byrd, Thomas Ford, Orlando Gibbons, John Jenkins, William Lawes, John Playford, Matthew Locke… et aussi celles d’auteurs anonymes élisabéthains ou jacobites. Mais c’est avec la découverte de manuscrits, comme celui du Manchester Gamba Book avec plus de 30 différentes manières d’accorder la viole (tuning ou scordatura), et très précisément les Bagpipe tunings, que j’ai commencé à réaliser qu’il y avait aussi pour la viole de véritables rapports avec une ancienne tradition celtique qui avait été oubliée comme on avait oublié l’existence même de l’instrument après la mort des derniers violistes (comme K. F. Abel qui de son vivant étonnait par la beauté et l’expressivité de ses improvisations à la viole de gambe). C’est Burney qui écrit : « I have heard him modulate in private on his six-stringed base with such practical readiness and depth of science, as astonished the late Lord Kelly and Bach, as much as myself. » (Je l’ai entendu moduler en privé sur sa basse à six cordes avec une telle facilité et une telle profondeur d’érudition, qu’il étonna feu Lord Kelly et Bach autant que moi-même). Pendant ces dernières années, j’ai commencé à étudier d’abord les recueils du XVIIe siècle, contenant des musiques écossaises et irlandaises, et tout de suite j’ai découvert l’extraordinaire richesse des principales collections de musique celtique : comme celles qui ont été recueillies par George Farquhar Graham The Songs of Scotland (Edinburgh, 1848), George Petrie Complete Collection of Irish Music (London, 1852, rééditée en 1902-1905), William Bradbury Ryan’s Mammoth Collection (Boston, 1883), O’Neill Music Of Ireland (New York, 1903) et The Dance Music Of Ireland (New York, 1907); P.W. Joyce Old Irish Folk Music and Songs (Londres 1909), James Hunter The Fiddle Music Of Scotland (Edinburgh, 1979), Alastair J. Hardie The Caledonian Companion (Edinburgh, 1981), Aloys Fleischmann Sources Of Irish Traditional Music, c. 1600-1855 (New York et Londres 1998), entre autres.Tout d’abord, j’ai été surpris de constater une telle abondance de matériel historique documenté car l’ensemble de toutes ces collections totalise plus de 10.000 œuvres ! Toutes de grande qualité artistique. J’ai trouvé aussi très intéressant de découvrir que certaines mélodies celtiques, avaient des figures très semblables à d’anciens chants de la Catalogne, comme celles qu’il y a entre « Le Testament d’Amélie » et « Màiri Bhàn Òg ». Mais la tâche la plus difficile a été celle de limiter la sélection des musiques (pour le CD) à une trentaine de pièces les plus représentatives, provenant d’époques et d’origines différentes, ainsi que celle de choisir les différents « tunings » adaptés à chaque type de musique. Pour cela, j’ai choisi de commencer par le répertoire jouable avec le dessus de viole, en utilisant trois différents instruments : une vielle du XVIe siècle pour les pièces les plus anciennes, et deux dessus de viole de Nicholas Chappuy, l’une à 5 cordes de 1730 et l’autre à 6 cordes de 1750, accordées en différentes « scordature ». Je choisis de présenter un total de 29 pièces, desquelles 12 sont jouées avec la viole seule, et 17 accompagnées par la harpe irlandaise et le psaltérion d’Andrew Lawrence-King, qui a réalisé tous les accompagnements en improvisant et suivant les informations d’époque et les pratiques traditionnelles. C’est une approche volontairement sobre, pour mieux montrer que tout l’essentiel de ces musiques se trouve en elles-mêmes, dans la force et la magie de leur discours musical. Je suis aussi très conscient de l’énorme distance qu’il peut y avoir entre le jeu d’un musicien qui est né avec cette musique et celui d’un autre qui a dû l’apprendre durant quelques années et qui sait qu’il lui reste encore beaucoup à apprendre. J’espère seulement que mon expérience avec les musiques de la Renaissance et du Baroque m’auront permis de donner une vision différente de celles qu’on entend dans les traditions modernes. Enfin cet enregistrement est surtout un hommage fervent à cet art de la transmission, au talent de tous ces musiciens qui ont créé ce merveilleux patrimoine et aussi à tous les autres, non moins importants, qui ont su le transmettre de génération en génération, pour le garder pleinement vivant. La musique exprime et prolonge ce que la parole ne peut plus dire, et le temps filtre et nettoie ces mélodies transmises par tradition orale, de tout ce qui n’est pas essentiel. C’est ainsi que toutes ces musiques, d’auteurs le plus souvent restés anonymes, sont devenues, grâce à leur vitalité, beauté, émotion et charme, indispensables à la célébration des moments les plus marquants des différentes étapes de la vie quotidienne et de la vie de l’homme. Chansons pour vaincre la tristesse ou célébrer les bonnes nouvelles, danses pour fêter les moments de bonheur et de joie, plaintes pour surmonter la perte d’un être cher ou le souvenir d’un fait malheureux, toutes ces œuvres merveilleuses, mais néanmoins fragiles, représentent l’apport sensible et le plus personnel de cultures, souvent marginalisées ou persécutées, à l’histoire de la création musicale. Elles restent et resteront dans nos cœurs, comme les voix véritables et l’esprit essentiel d’une civilisation qui a su et sait garder vivante grâce à la musique, la mémoire et l’âme de son identité historique. JORDI SAVALL Bellaterra, 20 de Février 2009
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ENGLISH VERSION The
man that hath no music in himself, William Shakespeare The Merchant of Venice, Act V, Scene 1 If the face is the mirror of the soul, a people’s music is the reflection of the spirit of its identity, individual in origin but taking shape over time as the collective image of a cultural space which is unique and specific to that people. All music passed on and preserved by the oral tradition is the result of a felicitous survival following a long process of selection and synthesis. Unlike some Oriental cultures which have evolved chiefly within an oral tradition, in the West only those types of music commonly known as traditional, popular or folk music have been preserved thanks to unwritten means of transmission. The invention of musical notation, a phenomenon very often linked to literary social circles, has allowed some cultures, such as those of China, Korea, Japan and Western Europe, to develop from ancient times many systems of notation which have been used in quite different situations. In other cultures, however, such as those of the Middle East (except Turkey) and South and South-West Asia, it is only in the last hundred years or so that such systems have evolved to any significant extent. In the “serious” music of Western Europe, musical communication based on the unwritten form survived until the end of the 17th century, but only in musical practices associated with improvisation and accompaniment on the bass continuo, and until somewhat later in music-making circles linked to the spiritual and temporal powers of the Church and the Court. It survived beyond the 17th century in England and especially during the 19th century in Germany, mainly in bourgeois circles. The phenomenon of written music has allowed a formidable development of musical forms and instruments, but at the same time it has contributed to the neglect and relegation to a second-class category of all those forms of living music which have traditionally accompanied the daily lives of the vast majority: in other words, popular music. That is why Celtic music for the fiddle in Scotland and Ireland (as well as the music of the communities who emigrated from those countries and settled in North America) constitutes a unique exception in Western Europe and is one of the richest and most beautiful legacies of all the living musical traditions of our time. The thousands of Airs, Pastorals, Laments, Hornpipes, Reels, Rants, Jigs, etc., which have been preserved by the various oral traditions, lovingly and perseveringly passed on from parents to their children, from one generation to the next, are true musical survivors, music which has had the privilege and, as far as we are concerned, the good luck to survive the inevitable and constant cultural amnesia, as well as the globalising folly, of humanity. Just as I was charmed and fascinated in 1965 by the forgotten voice of the viola da gamba, we decided, back in 1975, from our very first concerts and recordings with Montserrat Figueras and Hespèrion XX, to include alongside the repertoire of Court and Church music the wonderful music of the Spanish Jews (brutally expelled in 1492), which for more than five centuries has been preserved by the oral traditions of the various Sephardic communities who settled around the Mediterranean. It should be remembered that, barring a few exceptions (Falla, Bartók, Villa-Lobos, Kodaly, etc.), the misguided underestimation of this so-called “popular” or “folk” music has inevitably confined it to its own separate world, where it has had little communication with and, above all, little respect from the world of so-called “classical “ music. Moreover, the terrible amnesia caused by our loss of knowledge of ancient musical practice has often prevented us from appreciating the true worth of this music, even in the case of works by such renowned musicians as O’Carolan and others, of which only the melodic line has survived. Thus, the major Dictionaries of Music say of O’Carolan’s compositions that “unfortunately most are only in single line form, so that it is not definitely known how he harmonized or accompanied his melodies”. Of course, it is a pity that we do not know exactly how the accompaniment for any given piece was played, but it should also be remembered that, in many of these pieces, such is the beauty and emotion of the melody that nothing else is required. Moreover, in the case of pieces requiring accompaniment, enough is now known about the practice of improvised accompaniment in the 17th and 18th centuries to be able to reconstitute artistically satisfying versions. Similar reasoning led to J. S. Bach’s six Suites for unaccompanied cello being “completed” during the 19th century with a piano accompaniment, the work remaining neglected by performers as music fit for the concert hall for more than two hundred years. It was not until the end of the 19th century that they were rediscovered –in 1890!– by a young Pau Casals who, some ten years later, around 1900, began to introduce them to concert-goers all over the world. My first acquaintance with Celtic music goes back to 1977-78, when we visited Kilkenny to give a concert with Hespèrion XX. During the Festival the streets, squares and pubs were teeming with all kinds of musicians (fiddlers, flute-players…) performing non-stop solo or accompanied (on a guitar or a small harp). What incredible vitality! And it was magical to see so many musicians living their music with that degree of intensity and emotion! I also got to know the music by listening to historic recordings from the 1920s, including those by the brilliant James Schott Skinner and Joe MacLean, as well as concerts by groups such as The Chieftains and others. Over the last thirty years I have also been absolutely fascinated by the British repertory for the viol, and I have studied, performed and recorded many works for solo viol and viol consort by composers from Christopher Tye to Henry Purcell, including Tobias Hume, Alfonso Ferrabosco, William Corkine, William Brade, John Dowland, William Byrd, Thomas Ford, Orlando Gibbons, John Jenkins, William Lawes, John Playford and Matthew Locke, as well as anonymous Elizabethan and Jacobean composers. But it was the discovery of manuscripts such as the Manchester Gamba Book, containing more than 30 different tunings or scordatura tunings for the viol, and in particular the bagpipe tunings, which made me realize that the viol also had a very real connection with an ancient Celtic tradition which had been forgotten, just as the very existence of the instrument had sunk into oblivion after the death of the last violists such as K. F. Abel, who in his lifetime astonished audiences with the beauty and expressiveness of his improvisations on the viola da gamba. Charles Burney writes of him as follows: “I have heard him modulate in private on his six-stringed base with such practical readiness and depth of science, as astonished the late Lord Kelly and Bach, as much as myself.” In recent years, I first set about studying the 17th century collections containing Scottish and Irish music, and then I discovered the extraordinary richness of the principal collections of Celtic music, such as George Farquhar Graham’s The Songs of Scotland (Edinburgh, 1848); George Petrie’s Complete Irish Music (London, 1852, re-edited in 1902-1905); William Bradbury Ryan’s Mammoth Collection (Boston, 1883); O’Neill Music Of Ireland (New York, 1903) et The Dance Music Of Ireland (New York, 1907); P.W. Joyce’s Old Irish Folk Music and Songs (London, 1909); James Hunter’s The Fiddle Music of Scotland (Edinburgh, 1979); Alastair J. Hardie’s The Caledonian Companion (Edinburgh, 1981), and Aloys Fleischmann’s Sources of Irish Traditional Music, c. 1600-1855 (New York and London, 1997), among others. I was immediately surprised to find that there was such an abundance of documented historical material. Altogether, these collections contain more than 10,000 pieces, all of great artistic quality! I was also very interested to discover that certain Celtic melodies contained figures, or background phrases, very similar to those occurring in old Catalan songs, for example, those we find in “El testament d’Amèlia” and “Màiri Bhàn Òg”. The most difficult task has been to limit the selection of music on this album to about thirty of the most representative pieces of different origins and periods, as well as to choose the various tunings adapted to each type of music. So I decided to begin with the repertory that could be played on the treble viol, using three different instruments: a 16th century vielle for the oldest pieces, and two treble viols by Nicholas Chappuy, a 5-string instrument dating from 1730, and a 6-string instrument dating from 1750 tuned to a different scordatura. This recording presents a selection totalling 29 pieces, of which 12 are played on the solo viol and 17 are accompanied on the Irish harp and the psaltery of Andrew Lawrence-King, who improvises all the accompaniments, basing his performance on information from the period and traditional practice. We take a deliberately sober approach in order to show that the music, through the force and magic of its musical discourse, contains within itself all the essential ingredients. I am also very aware of the possibly huge distance between the playing of a musician who was born to this kind of music and another who has had to spend several years learning it and knows that he still has much to learn. I only hope that my experience with Renaissance and Baroque music has enabled me to offer an interpretation which is different from the interpretations heard in the modern traditions. Finally, this recording is above all a fervent tribute to the art of transmission, to the talent of all the musicians who have created this wonderful legacy, and also to all those who, no less importantly, have passed it on from generation to generation and so kept it vibrantly alive. Music expresses and prolongs what words cannot say, and time acts as a filter, distilling these orally transmitted melodies and paring them down to the truly essential. And that is how all these pieces, in the majority of cases by anonymous authors, thanks to their vitality, beauty, emotion and charm, have become an indispensable part of the celebration of the most significant moments in the different stages of our daily life. Songs to dispel sadness or celebrate good news, dances to express moments of happiness and joy, laments to overcome the loss of a loved one or the memory of an unhappy event… All these wonderful yet fragile works represent the sensitive and most intimately personal contribution of often marginalized or persecuted cultures to the history of musical creation. They remain and will continue to remain in our hearts as the true voices and the essential spirit of a civilisation which has succeeded in staying alive, thanks to music – the memory and soul of its historical identity. JORDI SAVALL
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